LES ENSEIGNEMENTS DES IMAGES ET DES PARABOLES (1) CONCERNANT L’EGLISE

       

LES ENSEIGNEMENTS DES IMAGES ET DES PARABOLES (1)

CONCERNANT L’EGLISE

 

Toutes ces images renferment de nombreux enseignements concernant la nature et la vocation de l'Eglise. Nous essaierons de dégager ici ceux qui concernent

1. les relations de l’Eglise avec Christ,

2. la nature de ses membres.

 

 

1. Relations de l'Église avec Christ.

L'analyse de ces figures nous montre que Christ en est toujours la partie essentielle sans laquelle la réalité ne peut subsister. Christ est le centre de gravité de l'image. De même l’Eglise n'existe que par Christ et en fonction de lui et elle ne peut vivre et subsister que si elle entretient avec son Seigneur des relations constantes et vivantes (2)

 

a) Par Christ :

Sans roi il n'y a plus de royaume, il ne reste que des sujets dispersés ; sans berger, pas de troupeau, mais des brebis éparses, suivant chacune sa propre voie ; sans cep nourricier, les sarments sont condamnés à devenir du bois mort. La construction d'une maison commence par le fondement, si celui-ci venait à se dérober, l'édifice s'écroulerait aussitôt ; « la femme a été tirée de l'homme » (1 Cor. 11. 8, 12) ; c'est l'homme qui a l'initiative dans la fondation d'un foyer et sans époux l'épouse n'est plus qu'une veuve impuissante.

Dans l'élaboration secrète du corps humain c'est encore la tête qui se forme la première et c'est elle qui commandera, dès la phase embryonnaire, la constitution du reste du corps. Sans tête le corps n'est plus qu'un cadavre inanimé.

 

b) Pour Christ. :

Le roi commande, mais ses sujets sont là pour mettre à exécution ses desseins. Dans les monarchies antiques, le seul personnage qui comptât, c'était le roi ; tout le pays vivait à son service. Le troupeau est la richesse du berger, et dans la réalité, le berger n'est pas là pour les brebis, mais les brebis pour le berger. « La femme est la gloire de l'homme » (1 Cor. 11. 7), elle « a été créée à cause de l'homme » (v. 9) pour être « une aide semblable à lui ». Le corps est au service de la tête pour exécuter les idées et les projets qu'elle a conçus.

 

c) Çhrist a besoin de l'Église.

Beaucoup de ces images font également ressortir la dépendance dans laquelle Christ a bien voulu se placer par rapport à l'Eglise pour l'accomplissement de sa volonté ici-bas. Le roi sans ses sujets est impuissant et ne peut réaliser aucun de ses desseins ; sans brebis on ne peut plus parler de berger ; sans sarments le cep ne peut porter du fruit, sans membres valides la tête ne peut rien faire.

Christ a besoin de l'Eglise et I ‘Église a besoin de Christ (3). Si le roi est touché, le peuple pleure, si un malheur frappe le peuple, le roi vient le défendre. Si le berger est malade, tout le troupeau en pâtit, si une brebis souffre, le berger la porte et la soigne. Racines et parties aériennes de la plante sont solidaires, que le cep ou les sarments soient endommagés, les fruits ne se forment pas. L'édifice ne remplit sa vocation que si fondations et superstructures restent indemnes. Et que dire du foyer ou du corps où l'interdépendance est vitale ! Mais n'est-il pas significatif que dans toutes ces images la partie qui représente Christ soit aussi la moins vulnérable : le roi n’est-il pas l'homme le mieux gardé du royaume, le berger plus intelligent que ses brebis; les fondations bien ancrées en terre, le cep profondément enraciné et plus résistant que les sarments, l'époux plus fort que l'épouse, et le cerveau, l'organe le mieux protégé sous la boîte crânienne ? Christ est au ciel et ses membres sont sur la terre, mais si un membre souffre, Christ n'en souffre pas moins avec lui. Quant à nous, ses membres, son épouse, sommes-nous sensibles à tout ce qui l'affecte et le touche ? Sommes-nous prêts à souffrir avec lui de tout ce qui l'afflige dans son corps ou au dehors ?

 

d) Relations vivantes et constantes.

Le royaume ne prospère que si le roi sait tout ce qui se passe dans le pays et si le peuple connaît et exécute la volonté du souverain. Un échange constant est indispensable entre eux. Toutes les révolutions et les tyrannies ont leur origine dans la rupture de cet échange.

Tout ira bien pour le troupeau s'il reste près du berger, à portée de sa voix : « si vous demeurez dans ma parole... vous êtes vraiment mes disciples… les brebis entendent sa voix... elles le suivent parce qu'elles connaissent sa voix » (Jn. 8. 31 ; 10. 3-4). Si les brebis s'éloignent, elles s'égarent et deviennent la proie des bêtes sauvages. Entre le cep et les sarments s'établissent des échanges constants ; si pour une raison quelconque ces relations sont interrompues, la plante dépérit et meurt. Fondement et construction dépendent étroitement l'un de l'autre : si le mortier s'effrite, si les poutres se dissocient, l'édifice perd sa stabilité. Dans le foyer pas d'harmonie sans échanges, pas d'unité sans transparence.

Sommes-nous conscients de la nécessité de ces échanges et de ces relations vitales avec Christ, ou pensons-nous qu'une fois lancée, l'Eglise peut bien subvenir seule à ses besoins, trouver en elle-même les ressources pour sa vie et son développement ?

 

 

2. Nature des membres.

Que nous apprennent ces images sur la nature des membres de l'Église ?

De toutes ces images ressort une identité de nature des différents membres de l'Église :

Dans un royaume tous les habitants sont sujets du même roi (4). Le troupeau n'est pas un zoo. Dans l'épi, il y a des graines d'une seule espèce (5). Le cep porte des sarments de vigne, et quand bien même on y grefferait des rameaux de poirier ou de pêcher, il ne résulterait aucun fruit de cette association hétéroclite.

Si une autre femme arrive à s'immiscer dans le foyer et qu’elle y soit tolérée au même titre que l'épouse, c'est la destruction du foyer. Tout corps étranger pénétrant dans le corps devra être assimilé, ou éliminé, sinon tout le corps en tombera malade (6).

L'étude approfondie d'un organisme vivant révèle une unité chimique et biologique profonde de toutes les cellules qui le composent (7). Le Créateur de ces merveilles n'aurait-il pas renfermé dans ces mystères une leçon pour nous, concernant le Corps de Christ, « plénitude de celui qui remplit tout en tous » ?

Cependant, si l'image peut suggérer ou confirmer la réalité, elle ne saurait servir de preuve, et pour établir de façon indubitable la nature des membres de l’Eglise selon le plan de Dieu, il nous faudra abandonner le terrain symbolique pour revenir aux textes clairs des Actes et des épîtres. L'étude de ces figures et paraboles de I ‘Eglise nous aura cependant appris mainte leçon précieuse sur la nature et la vocation de cette Eglise, elle nous aura montré que, bien que le Seigneur n'ait que rarement parlé d'elle, l’Eglise occupait constamment sa pensée, elle transparaît à travers de nombreux symboles et paraboles. Les apôtres éclairés par le Saint-Esprit ont développé ces images et en ont tiré les applications au fur et à mesure des circonstances. Ils n'ont pas épuisé le sens de ces symboles ; nous non plus. Si nous avons compris que toute la création matérielle n'est qu'une immense parabole du monde spirituel, nous saurons certainement, sous la conduite du Saint-Esprit, enrichir toujours à nouveau notre vision de Christ et de son Eglise. 

 

Alfred KUEN

www.batissezvotrevie.fr

 

 

(1) Voir les articles précédents dans cette même rubrique.

(2) L’Ekklesia, en effet, n’est pas la somme des croyants, elle n’est pas davantage une sainte institution : mais elle est le Corps de Christ qui ne se compose que de personnes ; la personne de celui qui est la tête et celles des membres de son corps. » (E. Brunner : « Malentendu… » p.14)

(3) « Il n'y a pas parallélisme entre le besoin que nous avons de Christ et celui qu'il a de nous. Nous dépendons de lui, que nous le voulions ou non. Lui veut bien avoir besoin de nous, comme il a eu besoin d'un ânon, le jour des Rameaux, mais par grâce, et non parce qu'en lui il y aurait quelque insuffisance » (J. M. Nicole).

(4) « Il importe qu'ils ne reconnaissent qu'un seul roi, leur libérateur, Christ, et qu'ils ne soient gouvernés que par la seule loi de Christ, c'est-à-dire par la vérité sacrée de l'Evangile » (Calvin).

(5) « On peut prétendre que les enfants élus de l'église invisible n'appartiennent pas seulement à titre prioritaire à l'église visible, mais qu'ils y appartiennent seuls. Les autres ne sont que mauvaises herbes dans le champ de blé. Les mêmes personnes appartiennent à l'église visible et à l'église invisible, les deux n'en font qu'une. » Wilhelm Löhe : « Drei Bücher von der Kirche », Gesammelte Werke (1954), t. V, p. 116. W. Löhe (1808-1872) fait partie des théologiens du réveil confessionnel luthérien du XIXe siècle en Allemagne.

« La maison fondée sur le roc, c'est donc l’Eglise des nouveau-nés, des élus, de tous ceux dont la vie commence, non pas à l'issue du sein de leur mère, maïs à l'audition de la Parole de Dieu, à la connaissance de Jésus-Christ, de tous ceux dont la vie est supportée par Jésus-Christ comme une maison est supportée par son fondement. Un homme dont la vie prend naissance ailleurs que dans le salut donné gratuitement, donné premièrement en Jésus-Christ, ne peut pas faire partie de I ‘Église fondée sur Jésus-Christ. Il est à côté du fondement. Il est hors de la maison forcément. Cette Eglise n'est

donc constituée que d'hommes pardonnés, régénérés, justifiés par la foi en Christ, enracinés en lui, et qui vivent à partir de lui... » R. de Pury : La Maison de Dieu, p. 9.

(6) Luther n'a jamais reconnu les incroyants comme membres de I ‘Église, il dit que « les hérétiques et les méchants sont dans les églises comme les pellicules, la vermine... etc. sont sur le corps, mais ce ne sont pas des membres naturels et bons. » Sermon sur Jean 7.38-42 (1531). « Christ est bien un Maitre de toutes choses, des pieux et des méchants, des anges et des diables, des vierges et des prostituées, mais il n'est la tête que des chrétiens pieux et croyants rassemblés dans l'Esprit: parce qu'une tête doit être incorporée à son corps, et les membres doivent dépendre de la tête, tirer d'elle leur action et leur vie ; c'est pourquoi Christ ne peut être tête d'une méchante communauté, même si celle-ci lui est soumise comme à son Seigneur. » Luther : De la Papauté à Rome (1520).

(7) « L'Eglise n'est pas le corps de Christ parce qu'elle est un corps, mais parce que cette réalité qu'est l'Église est à Christ ce que le corps est à la tête, et parce que cette réalité qu'est l'église est constituée par des croyants qui sont entre eux dans les relations où l'on voit les membres d'un même corps. » F. J. Leenhardt : Etudes sur l'Église dans le N. T. (Genève 1940), pp. 40-41.

 

 

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