RÉVEIL DANS UN CHAMP D'OS

 

RÉVEIL DANS UN CHAMP D’OS

 

« La main de l’Éternel fut sur moi, et l’Éternel me transporta en esprit,

et me déposa dans le milieu d’une vallée remplie d’ossements […] et voici,

ils étaient fort nombreux […] et ils étaient complètement secs […] Il me dit :

Prophétise sur ces os, et dis-leur : Ossements desséchés, écoutez la Parole

de l’Éternel ! […] Je prophétisai, selon l’ordre que j’avais reçu […] Et

l’Esprit entra en eux, et ils reprirent vie, et ils se tinrent sur leurs pieds : c’était

une armée nombreuse, très nombreuse »

(Ézéchiel 37.1,2,4,7,10)

 

          L’histoire sacrée ou profane, nous présente-t-elle un tableau plus ridicule que celui-ci ? Il incarne littéralement le désespoir. Qui s’est déjà trouvé confronté à un auditoire aussi muet ? Les prédicateurs s’attaquent au possible, les prophètes à l’impossible. Esaïe avait vu cette nation couverte de blessures et de plaies putrescentes ; or, la maladie avait rapidement provoqué la mort, la mort la désintégration, et maintenant, ces os disjoints témoignaient d’un désespoir profond. Le mot I-m-p-o-s-s-i-b-l-e s’étendait en lettres capitales au premier plan de cette scène. Il va sans dire qu’aucune foi n’est requise pour accomplir le possible ; mais, pour accomplir l’impossible, une miette de cette matière à la puissance atomique suffit, car un morceau gros comme une graine de moutarde réalisera davantage que nous n’aurions jamais osé imaginer. Dieu demande sans cesse aux hommes de faire, non ce qu’ils peuvent, mais ce qu’ils ne peuvent pas. Pour prouver qu’aucun tour de passe-passe ne suffit, mais qu’ils reliaient leur impuissance à son omnipotence, le mot « impossible » a disparu de leur vocabulaire.

 

          Les prophètes sont des hommes solitaires ; ils marchent seuls, ils prient seuls, et Dieu seul les forme. Il n’existe pas de moule pour eux ; leurs droits acquis émanent de Dieu, car le principe de la sélection divine reste impénétrable. Mais que nul ne désespère ; qu’aucun de nous ne dise qu’il est trop vieux, que le Seigneur se soit servi de lui ou pas. Moïse avait quatre-vingts ans quand il prit la tête d’un peuple esclave et brisé. Après ses soixante-dix ans, Georges Müller fit plusieurs fois le tour du monde, et sans l’aide de la radio, annonça l’Évangile à des milliers de personnes.

 

          Quant à Ézéchiel, il ne convoqua aucun comité, n’envoya aucune circulaire de prière ; il ne lança pas d’appels de fonds, et exécra toute publicité. Cependant, il s’agissait d’une question de vie ou de mort (il en va de même avec l’évangélisation de nos jours, que tout prédicateur se méfie de son numéro de « jonglerie théologique » qui pourrait faire penser à son auditoire : « Voilà un gars intelligent ! », sans le tirer de ses profondes ténèbres spirituelles). Alors, Ézéchiel reçut l’ordre de dire à cette montagne d’ossements : « Ôte-toi de là ». Il parla, et la chose s’accomplit. Devant lui se trouvait une malédiction, avait-il un remède ? Devant lui la mort, pouvait-il apporter la vie ? Il ne s’agissait pas d’une belle déclaration de doctrine. Chers croyants, écoutez. Le monde n’attend pas une « nouvelle » démonstration de la puissance de l’Évangile. En ces jours de profonde impuissance politique et spirituelle, de manque de respect envers la loi et la moralité, où sont les hommes, non de doctrine, mais de foi ? Aucune foi n’est nécessaire pour maudire les ténèbres ou présenter des rapports statistiques bouleversants quant à la rupture des digues et au raz de marée d’impureté infernale qui a submergé cette génération. De la doctrine, nous en avons à revendre, alors que le monde malade, triste, plongé dans la boue du péché, dans la fange de la sexualité, meurt de faim.

 

          En cette heure sombre, le monde dort dans les ténèbres, et l’Église dort à la lumière ; conclusion, c’est dans la maison de ceux qui l’aimaient que Christ a reçu ses blessures. « Et si on lui demande : d’où viennent ces blessures que tu as aux mains ? Il répondra : c’est dans la maison de ceux qui m’aimaient que je les ai reçues » (Zacharie 13.6). On appelle dérisoirement l’Église militante boiteuse, l’Église impotente. Tous les ans, nous utilisons des montagnes de papier et des fleuves d’encre pour réimprimer l’œuvre d’hommes morts, tandis que le Saint-Esprit qui est bien vivant cherche des hommes prêts à fouler aux pieds leur propre enseignement, à crever leur ego boursouflé, à confesser, qu’en dépit de leur vue, ils sont aveugles. De tels hommes, au prix de leur brisement, de leurs sanglots et de leurs larmes, aspirent à être oints d’un collyre divin, octroyé en échange de l’aveu honnête du dépérissement de leur âme. Il y a bien des années, un pasteur avait placé cet écriteau devant son église : « Une seule alternative pour cette église : le réveil ou l’enterrement ». Dieu apprécie un tel désespoir qui accable l’enfer. Folie, dites-vous ? Parfaitement ! Une église sobre ne produit jamais rien de bon. A l’heure actuelle, nous avons besoin d’hommes ivres du Saint-Esprit. Dieu se serait-il surpassé ? Wesley, Whitefield, Finney, Hudson Taylor appartiennent-ils à une édition de pasteurs spéciale ? Si j’ai bien lu le livre des Actes, ils correspondaient simplement à la norme.

 

Leonard RAVENHILL

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