L'ETUDE D'UNE PARABOLE

 

L’ÉTUDE D'UNE PARABOLE

  

          Jésus a raconté une quarantaine de paraboles . Elles constituent l'un des aspects les plus originaux et les plus profonds de son enseignement.

          Pourquoi s'est-il servi de ce genre de discours ?

 

1) Ses auditeurs y étaient habitués. L'Ancien Testament contient quelques paraboles (par exemple 2 Sam. 12.1-7; Es. 5.1-7 ).

 

2 ) L'image frappe l'attention. L'un des sens usuels du mot grec parabolé est : heurter. C'était le terme utilisé pour l'abordage de deux bateaux. Tous les éducateurs et orateurs savent que lorsque l'attention baisse, il suffit de raconter une histoire pour la ranimer.

 

3 ) L'image se fixe mieux dans la mémoire que le discours abstrait. Jésus savait que, sans le Saint-Esprit, ses disciples ne pourraient comprendre tout son enseignement. La parabole se graverait dans leur mémoire et y resterait jusqu'au jour où le Saint-Esprit leur permettrait d'en saisir le sens.

 

4) L'image force à la réflexion. Étymologiquement le mot parabole veut dire: jeté à côté; à côté d'un récit purement humain, on a jeté une signification spirituelle. C'est « une histoire terrestre avec un sens céleste ». Entre les choses d'ici-bas et les réalités spirituelles existe une affinité profonde, elles sont deux manifestations diverses d'une même pensée divine. Pour Jésus, tout parlait de Dieu et de son royaume. Dans ses paraboles, il nous dit: « Vous voulez connaître le royaume de Dieu ? Regardez autour de vous. Il est semblable à... » La comparaison, il est vrai, n'est pas toujours facile à saisir. Mais Jésus ne cherche pas la facilité ; au contraire, il veut faire réfléchir ses auditeurs.

          "Il veut les faire participer intérieurement à la conquête de la vérité qui sauve. De là aussi ces interrogations directes qui se trouvent dans maintes paraboles: "Que vous en semble ?... Ne fallait-il pas ?...Lequel des deux ?... " Ce que le maître a particulièrement en horreur c'est la passivité des âmes » (A. Aeschimann ).* Il ne faut donc pas nous étonner si l'interprétation correcte d'une parabole exige un travail de réflexion.

 

5 ) La parabole opérait un tri entre les auditeurs : lire Matthieu 13.1-3, 10-17. Elle les partageait entre ceux qui veulent suivre Jésus et comprendre son enseignement et ceux qui ne veulent pas faire l'effort nécessaire parce qu'au fond ils ne désirent pas suivre Jésus.

          Pour interpréter correctement les paraboles, il nous faudra donc consentir à faire un effort de réflexion et surtout bien l'orienter. Pendant des siècles, on a tiré des paraboles tout ce qu'on avait envie de trouver dans la Bible, et qu'on ne découvrait pas dans les passages clairs (1'ordre de succession de la papauté, la justification du nombre des sacrements ... ) Les Pères de l’Église les ont interprétées comme des allégories, c'est-à-dire des images dans lesquelles chaque détail a sa signification. Ainsi pour Origène les 5 lampes des 5 vierges sages sont nos 5 sens.** Pour Luther les deux ailes de la poule qui rassemble ses poussins (Luc 13.34) sont l'Ancien et le Nouveau Testament. Tel prédicateur déduit de la parabole des 10 vierges que la moitié seulement des chrétiens seront finalement sauvés.

 

          Quelles règles faut-il donc respecter pour interpréter correctement les paraboles ?

 

1) Rechercher la vérité centrale. Par chaque parabole, Jésus a voulu illustrer un enseignement. La parabole ne contient donc pas un résumé symbolique de l'ensemble de la doctrine chrétienne, elle n'en éclaire qu'un aspect. C'est ce trait principal ("la pointe de la parabole") qu'il s'agit de découvrir. Il se trouve à l'aide du contexte; c'est-à-dire des circonstances dans lesquelles la parabole a été prononcée (exemple Luc 19.11-12) ; des personnes auxquelles elle s 'adressait (exemple Luc 15.1-3, 19.9) ; de l'introduction (exemple Luc 18.1) ; ou de la conclusion (Luc 16. 9 ; 17 .10) qui en précise l'application. Parfois le Seigneur lui-même fournit l'explication (exemple Matthieu 22.14; 25.13; Luc 12. 21) ; parfois c 'est l'évangéliste (Luc 15.1-3 ; 18.1). Dans certains cas le discours qui suit et la réaction des auditeurs donnent la clé de l'enseignement central (exemple Luc 16. 9-15).

          Il faut se souvenir que les paraboles, avant d'être écrites, ont été prononcées devant un auditoire précis pour répondre à une situation donnée, généralement un conflit entre Jésus et une partie de son auditoire : elles sont des armes de combat pour attaquer, défendre ou provoquer la réaction. Pour bien les comprendre, il faut donc les replacer dans les circonstances historiques qui leur ont donné naissance. Le trait principal se reconnaît encore à son relief (c'est-à-dire l'importance qu'il a dans le récit ou dans son explication), à la facilité de lui subordonner les autres traits, à son accord harmonieux avec le contexte historique ou doctrinal. "Si nous possédons la bonne clé, non seulement elle ouvrira, mais encore elle tournera sans grincement, sans effort" (R. C. Trench, Les Paraboles p. 35).**

 

2 ) Subordonner les traits secondaires au trait principal:

          Ces traits secondaires servent généralement à mettre le trait principal en relief. Les caroubes, objet de la convoitise du fils prodigue, témoignent de la misère extrême dans laquelle il était tombé, image de la misère et des désirs insatisfaits de l'homme qui s'est éloigné de Dieu. La robe, l'anneau et le soulier que le père lui donne sont autant de marques de son amour et de sa sollicitude, ces cadeaux prouvent et soulignent le pardon accordé à celui qui revient à son Père.

          Dans les paraboles du semeur et de l'ivraie que Jésus lui-même a expliquées, nous trouvons, il est vrai, une correspondance entre quelques éléments de la parabole et des réalités spirituelles : mais en regardant de plus près, nous nous rendons compte que plusieurs détails n'ont pas reçu d'explication. D'autre part, les symboles expliqués (semence = Parole de Dieu; chemin = cœur endurci; oiseaux = diable; soleil = tribulations) constituent autant d'éléments d'une leçon unique et cohérente : les différentes manières de recevoir la Parole de Dieu et leur incidence sur les fruits qu'elle porte en nous.

          C'est autour de cette vérité centrale qu'il faut regrouper tous les éléments symboliques secondaires.

 

3 ) Se servir de la parabole comme illustration - non comme source – de doctrine biblique. Une image ne saurait constituer la base d'une règle de foi. Toute doctrine doit s'appuyer sur des déclarations claires et explicites des Écritures et non sur une interprétation d'un texte symbolique. Les hérétiques de tous les siècles se sont servis des paraboles pour justifier leurs extravagances, ils ont vu dans les personnages des paraboles la Sagesse, le Pape, les Goths et les Lombards, la doctrine de Calvin et l’Église de Genève...***

          Il nous faudra donc toujours appuyer la vérité centrale de notre parabole sur un certain nombre de citations claires des discours de Jésus ou des lettres des apôtres.

          L'interprétation des paraboles demande autant de prudence et d'humilité que de connaissance de l'ensemble des Écritures.

 

          Dans nos prochains articles, nous étudierons de façons pratiques plusieurs paraboles.

 

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* Pour qu'on lise les Paraboles, p. 10.

** Voir F. Quiévreux : La Parabole, pp. 104 ss. (Je sers, Paris 1946.)

*** V. : R. 1. Trench : Les paraboles de notre Seigneur (Lausanne, 1879), pp. 35 ss.