DE CHICAGO A LOS ANGELES

 

DE CHICAGO A LOS ANGELES

 

Chicago, été 1893

 

          Une grande exposition universelle attira des millions de personnes à Chicago au cours de l’été 1893. Cette manifestation fut le fruit du travail d’un groupe d’architectes doués, de financiers habiles et de chefs religieux cosmopolites. Elle fut le parfait symbole de l’orgueil de l’Amérique, fière de son passé et sûre de son avenir. Cette foire offrait en son centre un formidable complexe de bâtiments dénommé la « Ville blanche ». Pour beaucoup, cette fête devait être, tout à la fois, une nouvelle pentecôte et la manifestation de la nouvelle Jérusalem.

 

 

Le « Parlement mondial des religions »

 

          Il tint session pendant dix-sept jours en septembre 1893. Son but : réunir des représentants des dix grandes religions du monde. Des sages bouddhistes, des rabbins juifs, des évêques catholiques et des prédicateurs baptistes y avaient été invités. Cette manifestation fut celle qui rassembla le plus de monde et dont on parla le plus. Certains la virent comme l’âme de l’exposition, dont la Ville blanche était l’incarnation matérielle. Les doctes délégués de ce Parlement des Religions étaient issus de l’élite cultivée, de la fine fleur du monde religieux Ils écoutaient sagement les discours les uns des autres. La cérémonie finale fut grandiose, les discours enthousiastes et même l’Alléluia de Haendel fut chanté par les cinq cents voix du « chœur Polo » de Chicago.

 

 

Dramatiques événements

 

          Le 28 octobre 1893, un mois après la clôture du Parlement mondial des Religions, au cours d’une journée très importante appelée le « Jour des villes », Carter H. Harrison, le maire de Chicago, un protestant, en était l’hôte officiel. Le soir en rentrant chez lui, il fut assassiné par un catholique. Cet événement dramatique refroidit l’enthousiasme général. Au moment où l’exposition s’achevait, la ville était en proie à une grave récession économique, le chômage s’aggravait. Le 8 janvier 1894, un incendie s’alluma et fut impossible à maîtriser. Un à un, les splendides bâtiments furent atteints par les flammes. Des milliers de gens accouraient pour voir la scène. Ces palais, dont on avait dit qu’ils surpassaient la gloire de Rome, s’écroulaient les uns après les autres.

 

 

Los Angeles, 1906

 

          Une décennie plus tard à Los Angeles, un mouvement de renaissance religieuse vit le jour rue Azuza, au sein d’un groupe de chanteurs de cantiques et d’évangélisation itinérants. Ce second événement fit moins de bruit que l’autre, mais il marqua la naissance du mouvement pentecôtiste mondial.

 

          Il allait se dérouler dans un contexte peu encourageant, celui d’un quartier délabré de Los Angeles. Sous la houlette d’un prédicateur noir américain, dépourvu de formation théologique, ce Mouvement rassemblerait de pauvres travailleurs, domestiques, gardiens, ouvriers noirs et blancs. Et ces gueux auraient l’audace de proclamer l’événement d’une nouvelle Pentecôte, d’une nouvelle Jérusalem et de s’en prétendre les hérauts et les premiers bénéficiaires reconnaissants.

          Le Mouvement pentecôtiste allait se déclencher au sein de la fraction défavorisée de la population, mettant en avant une communauté humaine restaurée par le pouvoir de l’Esprit, une Jérusalem joyeuse où seraient abolies les larmes, l’injustice et la mort. Aucun de ces prédicateurs de la rue Azuza n’avait participé au Parlement mondial des Religions. Et pour cause : nul ne connaissait leurs noms, presque tous étaient autodidactes, issus d’un tout autre milieu de la société américaine. Ils n’avaient pas la bonne couleur de peau et n’appartenaient pas à la bonne classe sociale.

          Le renouveau de la rue Azuza allait projeter une vision de l’Amérique fort différente de celle proposée par le Parlement des Religions dont les archives jaunissent sur les étagères d’une bibliothèque, tandis que le Pentecôtisme prospère. Pour des millions de gens, il offre un espoir vital et une vision de ce que le monde devrait être, et la puissance de l’attrait qu’il exerce sur les déshérités de notre temps constitue une vivante protestation contre la situation qui leur est faite.

 

Harvey COX

www.batissezvotrevie.fr

 

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