UN MÉMORIAL QUI NOUS EST COMMANDE

 

UN MÉMORIAL QUI NOUS EST COMMANDE

 

          Il peut paraître particulièrement surprenant que celui qui a été racheté de la condamnation de ses péchés ait un jour besoin qu’on lui rappelle une telle transaction bénie ! Mais le Seigneur connaît si bien la faiblesse de notre cœur tortueux qu’il a pris les dispositions nécessaires pour que nous nous souvenions de son sacrifice pour nous. Il semble étrange que nous puissions oublier une chose si capitale mais, si nous sondons notre propre cœur, je pense que nous y découvrirons la nécessité d’un tel rappel.

          Le chapitre 22 de l’Évangile de Luc contient l’un des récits de l’institution de la Sainte Cène et, au verset 19, nous trouvons les paroles que l’on cite pratiquement à chaque fois que nous nous réunissons autour de la table du Seigneur : « Faites ceci en mémoire de moi. »

          Vous connaissez ces paroles sans doute par cœur et vous savez que l’apôtre Paul les cite de nouveau en 1 Corinthiens 11.24-25. J’aime à méditer les circonstances au cours desquelles, au fil du temps, les serviteurs de Dieu se sont souvenus de la mort du Seigneur. Il y eut d’abord, à Jérusalem, la chambre haute aux portes verrouillées ; puis la fraction du pain dans les maisons, quand les disciples prenaient leur nourriture avec joie et simplicité de cœur. Vinrent ensuite les catacombes de Rome, aux temps de la persécution. Les croyants dans le monde entier, en liberté comme sous la persécution, se sont souvenus avec fidélité et joie de la mort de leur Seigneur.

 

Ce mémorial nous est commandé

 

          Il ne s’agit p as seulement de quelque rite sentimental que l’Église aurait institué mais Christ nous l’ordonne et nous donne son autorité pour le pratiquer.

          Il se trouve que seuls Luc et Paul nous rapportent les mots « Faites ceci en mémoire de moi. » Cette expression appartient sans doute à une tradition de l’Église primitive, ce qui ne diminue en rien son autorité car, même si une déclaration n’apparaît qu’une seule fois dans la Bible, elle en revêt néanmoins toute l’autorité. L’Église voit en ces paroles le désir de Christ d’instituer de façon permanente ce rite de commémoration.

          Ainsi, en confirmation de cela, cette ordonnance devint une pratique régulière de l’Église au cours des siècles. En Actes 2, nous avons le récit de la première occasion où le peuple de Dieu obéit à ce commandement. Le verset 42 nous dit : « Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans les prières. » Puis, au verset 46 : « Ils étaient chaque jour tous ensemble assidus au temple, ils rompaient le pain dans les maisons, et prenaient leur nourriture avec joie et simplicité de cœur, louant Dieu... » Au chapitre 20, nous trouvons un autre aperçu de la pratique de l’Église primitive dans ce domaine en apprenant que les chrétiens avaient coutume de se réunir le premier jour de la semaine. Nous lisons : « Le premier jour de la semaine, les disciples étaient réunis pour rompre le pain... » (Actes 20.7) En 1 Corinthiens 10, se trouve une référence à la Sainte Cène qui nous permet de penser qu’elle se tenait régulièrement. « La coupe de bénédiction que nous bénissons, n’est-elle pas la communion au sang de Christ ? Le pain que nous rompons (une allusion à la pratique de l’Église primitive), n’est-il pas la communion au corps de Christ ? » (v.16)

          Remarquons aussi en passant que, dans le grec, le temps du verbe « faites », suggère la répétition. Il s’agissait de quelque chose que l’on faisait, et que l’on refaisait continuellement. Vous connaissez bien les mots du texte de l’institution de la Sainte Cène dans 1 Corinthiens 11.26, où Paul utilise l’expression : « Toutes les fois que vous mangez ce pain et que vous buvez cette coupe. » Il semblerait, d’après le chapitre 2 du livre des Actes, qu’ils célébraient la Sainte Cène chaque jour. Par contre, d’après Actes 20.7, il apparaît que, par la suite, cela devint une pratique hebdomadaire qui avait lieu le premier jour de la semaine.

          Le fait que Paul eût à faire face à des excès relatifs à la Sainte Cène indiquerait qu’il s’agissait déjà d’une pratique bien établie. Au chapitre 11 de la première lettre aux Corinthiens, Paul estime nécessaire de reprendre ces derniers à cause des abus qui se produisaient lorsqu’ils observaient la Cène. Puis il explique le sujet de sa réprimande : « Car, quand on se met à table, chacun commence par prendre son propre repas, et l’un a faim, tandis que l’autre est ivre. N’avez-vous pas des maisons pour y manger et boire ? Ou méprisez-vous l’Église de Dieu, et faites-vous honte à ceux qui n’ont rien ? Que vous dirai-je ? Vous louerai-je ? En cela je ne vous loue point » (v.21-22). Dans la mesure où notre histoire de l’Église primitive et la tradition peuvent nous éclairer sur ce point, il semble qu’il y avait à Corinthe un lien entre la Cène et ce qui la précédait, que l’on appelait l’ « Agapé », ou « festin d’amour ». Il y avait, en fait, si peu d’amour à Corinthe, que les riches se groupaient à un bout de la table et mangeaient somptueusement tandis que les pauvres s’asseyaient à l’autre bout et se contentaient de leur maigre portion. Il n’y avait aucune communion dans ce « festin ». Puis, immédiatement après ce prétendu « festin d’amour », venait la participation à la Sainte Cène. Les deux choses se contredisaient mutuellement. Ce ne sont pas tant ces abus qui nous intéressent ici, que le fait qu’ils nous permettent de comprendre que, de toute évidence, l’Église primitive s’engageait régulièrement dans la pratique de ce mémorial, et cela, sur l’ordre même du Seigneur.

          De plus, les premiers chrétiens avaient reçu ce rite comme une charge, comme une responsabilité. Au verset 23, Paul utilise un mot intéressant, « J’ai reçu du Seigneur », dont on se servirait normalement pour dire que l’on a reçu de quelqu’un une responsabilité qui nous engage de manière solennelle. Paul nous dit avoir reçu directement une parole du Seigneur, ce que renforce également le verset 23 par la position du mot « je », sur lequel le grec met une emphase particulière. Ainsi, nous pourrions paraphraser cette accentuation ainsi : « J’ai moi-même reçu du Seigneur ce que je vous ai enseigné. » Nous ne savons pas avec certitude si l’apôtre Paul se réfère ici à une communication que lui aurait faite le Seigneur lui-même, ou s’il parle des instructions qu’il avait reçues de la part des disciples du Seigneur. Le fait même, pourtant, qu’il mette l’emphase sur le pronom personnel pourrait suggérer que, d’une certaine manière, le Seigneur le lui avait communiqué en personne. Alors, ce « moi-même » que nous ajoutons caractériserait particulièrement bien sa pensée. « J’ai reçu du Seigneur ce que je vous ai enseigné » indique que cela faisait autorité. Ainsi, de par les paroles mêmes de l’institution et par la pratique de l’Église primitive, nous apprenons que, chaque fois où nous nous assemblons autour de la table du Seigneur, nous accomplissons ce qu’il nous a commandé. Notre participation à la Sainte Cène découle de l’autorité du Seigneur lui-même.

          Le moment est peut-être bien choisi, dans notre considération de la Sainte Cène, pour remarquer les termes que l’on utilise pour désigner ce rite particulier. Tout d’abord, nous relevons celui que l’on trouve en 1 Corinthiens 11.20 : « Le repas du Seigneur ». Il n’existe probablement pas de meilleur terme pour désigner cette commémoration. Les chrétiens ont pourtant plus coutume, du fait de l’influence latine sur notre langue, d’utiliser l’expression que nous avons abondamment employée jusqu’ici, à savoir : « La Sainte Cène ». Mais cela revient au même, puisque « cena » n’est que l’expression latine pour désigner le repas du soir. Bien entendu, les chrétiens, ceux qui appartiennent à Christ, ne commémorent pas n’importe quel « repas du soir », mais seulement celui qui précéda la mort de leur Sauveur, durant lequel il institua cette pratique dont il est question maintenant. Ainsi, elle n’est pas seulement la « Cène », mais la « Sainte Cène », montrant ainsi son caractère particulier et spécial.

          Une page plus haut, dans 1 Corinthiens chapitre 10, nous trouvons une autre expression. Il s’agit du mot « communion » (v.16). Il traduit le terme grec « koinonia », qui signifie « partager » la « communion » est le fait d’appartenir ensemble au Seigneur Jésus et nous rappelle que nous ne sommes pas en Christ individuellement, mais ensemble. En lui, nous partageons les uns avec les autres. Dans ce contexte, le mot « communion » ne se réfère pas tant à ce que nous pourrions appeler notre communion « verticale », notre relation directe et intime avec le Seigneur, qu’il indique notre union les uns avec les autres en Christ. Nous nous pencherons sur cela un peu plus en détail par la suite, lorsque nous examinerons l’expression « communion fraternelle ». Voilà donc le second mot : la « communion ». Nous utilisons couramment ce terme dans nos Églises, mais peut-être en oublions-nous parfois tout le poids et toute la signification.

          On peut encore citer deux autres façons de désigner la Sainte Cène. Actes 2.42 l’appelle : « la fraction du pain », et 1 Corinthiens 10.21, la « table du Seigneur ». Le terme que nous utilisons pour qualifier cet office importe peu. Que nous l’appelions « la Sainte Cène » (ou le repas du Seigneur), la « communion » ou la « table du Seigneur », tous ces termes le désignent de façon appropriée.

          Dans la suite de l’histoire chrétienne, l’Église en vint à appeler ce rite l’ « eucharistie ». Ce mot n’a rien de mauvais en soi-même, puisqu’il signifie tout simplement « rendre grâces » et reflète l’impression que la principale caractéristique de l’institution de cette cérémonie fut l’action de grâces offerte par notre Seigneur. Quelle action pourrait davantage transporter nos cœurs lorsque nous participons à la table du Seigneur que de rendre grâces ? Peut-être ne participons-nous jamais aussi bien à la Sainte Cène que lorsque nous élevons nos cœurs dans l’action de grâces. Ainsi donc, même si ce mot « eucharistie » désigne maintenant, dans la conscience populaire, la conception d’un « rituel », n’oublions jamais sa douce simplicité : c’est une action de grâces.

          Ne perdons pas de vue, toutefois, que nous observons cette commémoration parce que nous en avons reçu le commandement. Quand nous nous réunissons de la sorte, ce n’est pas seulement selon notre propre désir, mais parce qu’il nous a été commandé de le faire. Malheur au chrétien qui néglige la Sainte Cène ! A moins que nous n’ayons une bonne raison de nous absenter, malheur à nous si nous partons quand la table du Seigneur est apprêtée ! Comment pouvons-nous, pour quelque raison domestique ou sociale de moindre importance, quitter la maison du Seigneur quand sa table y est dressée ! Comment pouvons-nous tourner le dos au repas du Seigneur ! Il s’agit d’un commandement.

 

Ernest KEVAN

www.batissezvotrevie.fr

 

Écrire commentaire

Commentaires: 1
  • #1

    Mitsono (samedi, 25 juillet 2020 11:29)

    Merci pour ce rappel très précieux dans notre vie chrétienne.