JÉSUS SUR LA MER

 

 JÉSUS SUR LA MER

 

          La montagne nous a parlé d’intimité, à l’écart, dans la communion avec le Seigneur. La mer présente plutôt les circonstances extérieures, le brouhaha des foules, les hauts et les bas de la vie. C’est aussi le ministère public, qui a tenu une si grande place dans la carrière de Jésus.

          En effet, il n’est pas resté sur la montagne où, après une nuit de prière, il avait appelé les apôtres : « Après être descendu avec eux, il s’arrêta dans un endroit plat, avec une grande foule de ses disciples, et une grande multitude de peuple… » (Luc 6.17) Jésus s’approche des malades, des âmes tourmentées ; il est toujours disponible pour chacun. Il n’a pas passé sa vie sur les hauteurs. Il est aussi descendu près de la mer. Il ne s’est pas éloigné de la foule, mais a voulu s’en approcher. Il rencontrait chacun tel qu’il était, sans faire de distinction entre les sympathiques et les plus repoussants, toujours prêt à répondre inlassablement à tous les besoins : « Le fils de l’homme n’est pas venu pour être servi, mais pour servir. » (Matthieu 20.28 ; Marc 10.45)

 

 

Près de la mer

 

          « Comme il marchait le long de la mer de Galilée, il vit Simon et André, le frère de Simon, qui jetaient un filet dans la mer. » (Marc 1.16) Les deux hommes laissent leurs filets, leur source de revenus, et s’en vont après lui ; il les fera devenir pêcheurs d’hommes.

          Un peu plus loin, Jacques et Jean raccommodaient les filets dans la barque. Aussitôt Jésus les appelle. Eux laissent non seulement leur barque, mais aussi leur père (v.17-20).

          Plus loin, nous le voyons sortir encore, et longer la mer ; « en passant, il vit Lévi, le fils d’Alphée, assis au bureau des impôts, et lui dit : Suis-moi. Il se leva et le suivit. » (Marc 2.13, 14) Lévi quitte sa position au service des Romains, son travail, sa profession. Il ne pourra jamais les reprendre, comme ses collègues leurs filets (Jean 21) et il n’emporte, symboliquement, que son encrier et sa plume. Plus tard, il écrira l’évangile qui fera revivre, pour tant de générations, toute la carrière du Messie promis.

          Au milieu de leur activité professionnelle, de leurs obligations familiales, l’appel du Seigneur avait interpellé ces hommes. Ils l’ont fait passer, lui, au premier plan. Toute leur vie a été transformée. Le Seigneur n’appelle pas chacun des siens à consacrer tout son temps à son service, mais souvent dans un service particulier, sa grâce nous offre des occasions de lui être utiles. Répondrons-nous comme le serviteur de Job : « J’ai appelé mon serviteur, et il n’a pas répondu... » (19.19), ou comme ces hommes de Galilée ?

          Près de cette mer, Jésus va guérir beaucoup de malades, secourir les affligés, délivrer de la puissance du mal ceux qui en étaient captifs (Marc 3.7-11).

          « Il se mit encore à enseigner près de la mer. Une très grande foule se rassembla autour de lui, si bien qu’il monta dans une barque sur la mer et s’assit. Toute la foule était à terre sur le bord de la mer. » (Marc 4.1) Quel tableau de la persévérance inlassable du parfait Serviteur, qui savait guérir et enseigner (Actes 1.1) ! Il s’adaptait à son auditoire, instruisant les uns par des paraboles, et, dans le particulier, expliquant tout à ses disciples (Marc 4.34). Les foules étaient venues de très loin, du sud et du nord du pays. Jésus était ému de compassion par ces multitudes.

          Sommes-nous émus de compassion par ces brebis lassées et disperses sans berger, à notre époque déchristianisée, où tant d’âmes ont besoin du message de Christ ?

          « Vers la mer de Galilée… on lui amène un sourd. » (Marc 7.31-35) Nous aussi pouvons amener des âmes en contact avec le Seigneur, comme Philippe l’avait fait envers Nathanaël, ou André envers Simon (Jean 1). Que d’aveugles et de sourds autour de nous ! Jésus emmène l’homme seul à l’écart et le touche, montrant que, de cœur, il prend part à ses circonstances. Il faut une décision personnelle pour venir à Christ. Le Seigneur regardant vers le ciel nous donne là un exemple à suivre dans la conscience de notre incapacité. Les oreilles et la bouche du sourd-muet vont s’ouvrir. Qui va-t-il dorénavant écouter ? Quel genre de paroles prononceront ses lèvres ? Jésus lui dit : « Ephphata, c’est-à-dire : Ouvre-toi ! » Ouvre-toi à une vie nouvelle, à la vérité, à la vraie joie. Si tu sais écouter, tu pourras parler et apporter à d’autres le message de la grâce. S’il y a trop de muets parmi nous, est-ce peut-être parce qu’ils ne savent pas écouter ?

          « A l’écart », les disciples s’étaient retrouvés avec le Maître pour lui raconter « tout ce qu’ils avaient fait et tout ce qu’ils avaient enseigné. » (Marc 6.30) « A l’écart » les oreilles du sourd se sont ouvertes: il faut d’abord écouter, ensuite voir, comme l’aveugle conduit par Jésus « à l’écart », afin de le guérir. Enfin, on peut contempler sa gloire « à l’écart » sur la haute montagne.

 

 

Les traversées

 

          A la fin d’une journée où le Seigneur avait enseigné les foules, annonçant la Parole « selon qu’ils pouvaient l’entendre », il dit à ses disciples : « Passons à l’autre rive ». On va traverser la mer, symbole de toute l’agitation des circonstances de la vie, mais Jésus est avec les siens. Pourquoi, face au vent et aux vagues, sont-ils craintifs et n’ont-ils pas de foi ? Ils avaient oublié la puissance de Celui qui les accompagnait (Marc 4.33-41).

          Lui, véritablement homme, fatigué du labeur du jour « à la poupe, dormait sur un oreiller ». C’est la seule occasion où nous le voyons dormir. Mais le repos ne lui sera pas accordé, pas plus que l’eau dont il avait soif au puits de Sichar, ou les figues du figuier qui n’avait que des feuilles. Dans sa parfaite humanité, il a connu la fatigue, la soif et la faim ; il n’y avait pas de repos pour lui. Véritablement Dieu, il se lève, reprend le vent et dit à la mer : « Silence, tais-toi… et il se fit un grand calme… Ils dirent entre eux : Qui donc est celui-ci, pour que le vent même et la mer lui obéissent ? » Agur l’avait déjà demandé : « Qui a rassemblé le vent dans le creux de ses mains ? Qui a serré les eaux dans un manteau ? Quel est son nom, et quel est le nom de son fils, si tu le sais ? » (Proverbes 30.4) Et nous, quelle réponse pouvons-nous donner ?

          Jésus avait traversé la mer pour délivrer un seul homme possédé par un démon. Tel était son amour pour la foule, tel il était pour un seul démoniaque. Ayant encore repassé à l’autre rive, se trouvant au bord de la mer (Marc 5.21), il est accueilli par Jaïrus qui vient le supplier pour sa fille. Une femme est guérie à son passage, la jeune fille est rendue à ses parents. Puis « il sortit de là et vint dans son pays ; ses disciples le suivirent » (6.1).

          Lors d’une autre traversée, un autre soir, les disciples se trouvent seuls « au milieu de la mer » (Marc 6.47). Telle est l’épreuve à laquelle le Maître les a contraints, après la joie de la multiplication des pains. Il leur fallait cette nouvelle expérience, car, par les miracles, « ils n’avaient pas été rendus intelligents » (6.52). Ainsi, lorsqu’un temps de bénédictions ne nous a pas conduits plus près de lui, le Seigneur permet des jours d’adversité pour nous amener à mieux le connaître : « Véritablement, tu es le Fils de Dieu ! » (Matthieu 14.33). Jetés çà et là par la tempête, se tourmentant à ramer, comme nous l’avons vu, les disciples l’oublient ; lorsque Jésus vient à eux, ils croient voir un fantôme. Il ne s’impose pas, voulant simplement « passer à côté d’eux » (Marc 6.48), comme plus tard, à Emmaüs, il fera « comme s’il allait plus loin » (Luc 24.28) ; il désire être invité ! A leurs cris, sa voix répond : « C’est moi ; n’ayez pas peur ». Il calme d’abord les esprits, ensuite les éléments déchaînés seront apaisés. L’angoisse que l’on peut éprouver dans des situations difficiles ne provient pas des circonstances elles-mêmes, mais de la manière dont elles sont abordées. Il importe pour le croyant de les affronter avec un esprit calme, en communion avec le Seigneur : « C’est moi ; n’ayez pas peur ». Pierre désire alors le rejoindre, en marchant sur la mer démontée pour aller à Jésus. Il fallait toute la puissance divine ; mais quand Simon regarde le vent, il a peur et commence à enfoncer ! Que va-t-il devenir ? « Seigneur, sauve-moi ! Aussitôt Jésus, étendant la main, le saisit ». La main fidèle n’a pas laissé son disciple disparaître dans les eaux. L’homme de petite foi avait douté, mais le Sauveur ne tarde pas à le secourir. « Quand ils furent montés dans la barque, le vent tomba. » (Matthieu 14.28-31)

          Une autre traversée de la mer (Marc 8.10) avait amené Jésus aux quartiers de Dalmanutha. Les pharisiens discutent avec lui. Le Seigneur ressent dans son esprit cette opposition tenace et il soupire « profondément » (v.12). Les laissant, il remonte dans la barque et s’en va à l’autre rive. Pour quels résultats cette double traversée ? Au retour, il enseigne ses disciples et les met en garde contre le levain des pharisiens et celui d’Hérode : d’un côté on a l’hypocrisie, le légalisme, le formalisme, de l’autre l’amitié du monde pour s’y faire une position. Successivement il leur pose neuf questions ; ils ne savent que répondre. Ils ressemblent à cet aveugle que le Seigneur va conduire par la main à l’écart, en prenant tant de peine jusqu’à ce que sa vue soit rétablie et qu’il voie « tout clairement » (v.25). Avec tristesse il doit leur dire : « Comment ne comprenez-vous pas ? » (v.21). Cela ne nous arrive-t-il pas aussi de douter de la toute-puissance de Dieu, et même pire, de son amour ?

 

 

Les pêches miraculeuses

 

          En Luc 5, Pierre, qui avait déjà rencontré Jésus sur les bords du Jourdain, va connaître sa puissance et trouver en lui son Sauveur. Devant le miracle, il s’écrie : « Retire-toi de moi, Seigneur, car je suis un homme pécheur ». Mais Jésus ne s’en va pas. Il ne repousse pas le pêcheur à genoux devant lui, au contraire : « Ne crains pas ; dorénavant tu prendras des hommes » (v.8, 10).

          Plus tard Pierre touchera du doigt la puissance du Créateur. Sans réfléchir, lorsque les receveurs des didrachmes (impôt du temple) lui avaient demandé si son maître ne payait pas la taxe, il avait répondu affirmativement. Quel embarras, lorsqu’il se retrouve avec lui dans la maison ! Jésus le prévient. Il accepte cette position d’étranger sur la terre. Lui, le Seigneur du temple va se soumettre à cet impôt pour ne pas les scandaliser. Toutefois le Créateur n’a pas besoin d’une aide humaine. Il ne va pas demander l’aumône ! Il envoie son disciple à la mer jeter son hameçon et prendre le premier poisson qui monterait : « Quand tu lui auras ouvert la bouche, tu y trouveras un statère ; prends-le et donne-le leur pour moi et pour toi » (Matthieu 17.24-27). Pourquoi « pour moi et pour toi » et non pas « pour nous » ? Pierre avait mis son Maître au niveau d’un autre Juif, mais la gloire du Messie devait être préservée. Malgré la place d’abaissement qu’il prenait, il n’était pas au même niveau que son disciple. Le message transmis par Marie de Magdala dira : « Je monte vers mon Père et votre Père (pas : vers notre Père), et vers mon Dieu et votre Dieu » (Jean 20.17). Il place les siens dans la même relation que lui avec le Père, avec son Dieu. Mais il reste, lui, « premier-né entre plusieurs frères » (Romains 8.29).

          Simon Pierre, le pêcheur, a rencontré le Sauveur et le Créateur. Il va connaître le « Restaurateur »* Au bord de cette même mer de Galilée, après une nouvelle pêche miraculeuse, Jésus ressuscité lui dit : « Simon, fils de Jonas, m’aimes-tu plus que ceux-ci ne m’aiment ? ». Pierre ne peut que répondre : « Oui, Seigneur, tu sais que je t’aime ». Successivement, Jésus le restaure dans le service : « Fais paître mes agneaux… Sois berger de mes brebis… Fais paître mes brebis » (Jean 21). L’amour pour le Seigneur et les siens en est la seule motivation.

          Sur les rives de cette mer de Galilée, les foules avaient bénéficié du ministère du Sauveur. Près de la mer et sur la mer, les disciples avaient appris à le connaître dans sa puissance, dans son amour, dans sa grâce. Il avait été bienfaisant de se trouver avec lui, seuls sur la montagne. Mais jamais ils n’auraient appris là-haut les leçons qu’ils ont reçues sur la mer, dans le vent, dans les tempêtes puis au milieu des estropiés, des pauvres et des aveugles.

          Un jour viendra, où il sera dit « la mer n’est plus » (Apocalypse 21.1). Il reste un repos pour le peuple de Dieu. C’est le repos éternel auprès de Jésus. Les peines et les douleurs auront passé, mais l’Ami fidèle qui aura été avec nous pour les traverser, restera le même éternellement.

 

Georges ANDRE

www.batissezvotrevie.fr

 

* Celui qui relève après une chute et qui « restaure » la communion interrompue.

                       

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