LA MESSE

  

         LA MESSE

 

          La messe est aujourd’hui le fond même du culte catholique. C’est, dit le catéchisme, « un sacrifice non sanglant dans lequel Jésus-Christ, contenu dans les espèces du pain et du vin, s’offre sur l’autel à Dieu par les mains du prêtre. »

          On le voit, pour que la messe puisse être célébrée, pour que le sacrifice puisse être offert il y a une question préalable absolument indispensable : il faut une victime. Le pain et le vin doivent donc changer de nature et devenir le corps, le sang, l’âme, la divinité du Christ. C’est là ce que le prêtre prétend faire en prononçant les paroles sacramentelles : « Ceci est mon corps ». C’est la doctrine de la transsubstantiation, c’est-à-dire du changement de substance. Elle n’a absolument rien d’évangélique.

          La parole : « Ceci est mon corps » ne peut signifier autre chose que : ceci représente mon corps. Autrement Jésus aurait, lui vivant, donné sa propre chair à manger aux apôtres, et, de plus, se serait mangé lui-même !

          Quand le Christ dit : « Je suis la porte, je suis le chemin je suis le cep », cela peut-il signifier que Jésus soit littéralement une porte, un chemin, un cep de vigne ? Le prétendre serait absurde. C’est une manière figurée de parler, que tout le monde comprend. Il n’en peut être autrement de l’expression : « ceci est mon corps ». Le Nouveau Testament d’ailleurs – chose à remarquer – n’emploie jamais que les expressions de pain et de vin pour désigner les éléments de la Cène.

          Aucun des anciens Pères n’a cru à la transsubstantiation. On pourrait le prouver par de longues citations. Bornons-nous à quelques-unes.

          « Le Christ, dit Justin Martyr, nous a donné le pain, en mémoire du corps qu’il a pris… et il nous a ordonné de prendre le calice… en mémoire de son sang ».

          « Dans l’Église, dit saint Macaire, du pain et du vin sont offerts, étant la figure de sa chair et de son sang » (du Christ).

          « Le Seigneur, dit saint Augustin, n’a point fait difficulté de dire : « ceci est mon corps » quand il donnait le signe de son corps ».

          Que pourrions-nous ajouter à de telles déclarations ?

            La doctrine de la présence réelle n’apparaît qu’au 9° siècle. Elle a pour père un moine, Paschase Radbert. C’est lui qui, le premier, dans un livre devenu célèbre, soutint que par la consécration du prêtre, l’hostie perd entièrement sa nature de pain et devient le corps même que le Sauveur possédait étant sur terre.

          Cette doctrine matérialiste fut vivement combattue par d’autres personnages marquants de l’époque, comme Bertram, Scot Erigène, Bérenger, etc. Le temps s’écoula, la controverse continua son train ; mais ce ne fut que 160 ans plus tard, en 1050, qu’un concile, réuni à Rome par Nicolas II, approuva la théorie de Radbert.

          Malgré la décision du concile cette doctrine ne fut pas encore reçue officiellement dans l’Église. Les esprits demeuraient partagés à ce sujet. En 1047 le pape Grégoire VII lui-même ne savait pas encore s’il fallait ou non admettre la transsubstantiation. Il commanda un jeûne aux cardinaux pour obtenir de Dieu la révélation de la vérité ; mais la révélation ne vint pas. En 1140, c’est-à-dire 75 ans plus tard, la question était débattue devant les théologiens de Paris et nos savants docteurs la tranchaient dans un sens opposé à celui de Radbert. Ce n’est qu’en 1215 que le Concile de Latran décréta enfin solennellement que la transsubstantiation devait être désormais un article de foi pour tous les catholiques.

          Dès lors une période nouvelle commença. La communion dans laquelle les fidèles faisaient la commémoration du sacrifice de la croix, et qui avait jusque là été considérée comme le fond même de l’eucharistie, ne fut plus envisagée que comme un élément très secondaire. On fit résider la perfection du sacrement dans la consécration opérée par le prêtre et dans l’offrande à Dieu de l’hostie ainsi divinisée. C’est là ce qui constitue la messe...

          On veut faire remonter la messe à l’Évangile, mais l’Histoire est là, implacable et vengeresse ; elle nous montre, par les dates et par les faits, la naissance de ce dogme tout moderne, au commencement du 13° siècle. Ainsi pendant 1200 ans l’Église a sans doute célébré la communion, mais n’a pas connu ce qu’on appelle aujourd’hui le saint sacrifice de la messe.

          La messe, un sacrifice, et un sacrifice renouvelé chaque jour des milliers et des milliers de fois !… N’est-e pas là le renversement de tout l’Évangile ? Comment un prêtre ferait quotidiennement descendre le Christ sur la terre ? Mais Pierre nous déclare que « le ciel doit le garder jusqu’aux temps de la restauration universelle » (Actes 3.21). Au jour de l’Ascension les anges dirent aux apôtres : « Celui qui vous a été enlevé, ce même Jésus, viendra comme cela, de la même manière que vous l’avez vu partir vers le ciel » (Actes 1.11). Paul enseigne que Christ « est monté au-dessus de tous les cieux, afin qu’il remplisse toutes choses » (Éphésiens 4.10), et l’épître aux Hébreux ajoute qu’il « s’est assis pour toujours à la droite de Dieu » (Hébreux 10.12).

          La messe, un sacrifice ! Mais le grand sacrifice du Calvaire a aboli tous les sacrifices. La sainte victime ne s’est-elle pas écriée en mourant : « tout est consommé ? ». N’était-ce pas dire : la rédemption du monde est accomplie ?

          Écoutez encore l’épître aux Hébreux : « Il nous convenait, en effet, d'avoir un souverain sacrificateur comme lui, saint, innocent, sans tache, séparé des pécheurs, et plus élevé que les cieux, qui n'a pas besoin, comme les souverains sacrificateurs, d'offrir chaque jour des sacrifices, d'abord pour ses propres péchés, ensuite pour ceux du peuple, - car ceci, il l'a fait une fois pour toutes en s'offrant lui-même… »(Hébreux .26-27) « Christ n'est pas entré dans un sanctuaire fait de main d'homme, en imitation du véritable, mais il est entré dans le ciel même, afin de comparaître maintenant pour nous devant la face de Dieu. Et ce n'est pas pour s'offrir lui-même plusieurs fois qu'il y est entré, comme le souverain sacrificateur entre chaque année dans le sanctuaire avec du sang étranger; autrement, il aurait fallu qu'il eût souffert plusieurs fois depuis la création du monde, tandis que maintenant, à la fin des siècles, il a paru une seul fois pour abolir le péché par son sacrifice. » (Hébreux 9.24-26) « Car, par une seule offrande, il a amené à la perfection pour toujours ceux qui sont sanctifiés… Or, là où il y a pardon des péchés, il n'y a plus d'offrande pour le péché. » (Hébreux 10.14, 18)

          Ainsi Jésus a tout accompli. Sous l’ancienne loi les sacrificateurs étaient sans cesse renouvelés ; avec le Christ, il n’y a plus qu’un seul et parfait sacrifice, source inépuisable de salut pour tout pécheur qui crie miséricorde. De quel droit alors oser prétendre que son sacrifice doit être répété sans cesse ? Ne voyez-vous pas que la messe est le contre-pied même de l’Évangile ?

 

F. MARSAULT

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