« MAIS IL VOUS EST AVANTAGEUX QUE JE M’EN AILLE... »

   

 

 « MAIS IL VOUS EST AVANTAGEUX QUE JE M’EN AILLE... »

 

          Les douze apôtres, quelle épopée ils ont vécue ! Jadis, ils menaient une petite vie « comme tout le monde ». Mais, depuis presque trois ans, tout a changé ils suivent Jésus ... Chaque jour est plein d'imprévus. Ils entendent, ils voient et ils font des choses merveilleuses… Il me semble presque que je les entends chanter, comme tous les nouveaux convertis et ceux qui viennent d'être visités du Saint-Esprit :

 

          « C'est ici le ciel sur la terre,

          C'est ici le ciel sur la terre... »

 

          C'était bien cela pour eux…

 

          Qu'auriez-vous pensé, vous, si tout à coup, plongés dans un pareil bonheur,vous aviez entendu Jésus vous dire : « Mais il vous est avantageux que je m'en aille ! » (Jean 16.7) Sans doute, vous seriez-vous écriés « Seigneur, ce n'est pas possible, tu plaisantes ! »

          Cependant, très vite, à l'attitude de Jésus, vous auriez compris qu'Il ne plaisantait pas... Alors, j'imagine, le cœur saisi d'une indicible angoisse, et sans vouloir encore croire à ce que vous veniez d'entendre, vous auriez continué à dire : « Non, Seigneur, ce n'est pas possible, rien ne peut être plus « avantageux » pour nous que ta chère présence, que le pain du miracle, que ce que nous entendons et voyons en ta compagnie... » Et vous auriez passé par une crise spirituelle profonde où il vous aurait semblé ne plus rien comprendre à rien...

          A vrai dire, cela ne m'étonnerait pas que quelques-uns d'entre vous aient déjà connu un de ces moments inexplicables et ahurissants: en pleine euphorie, en pleine joie spirituelle, c'est le dépouillement inattendu et presque inadmissible. Alors, chaque battement du cœur devient douloureux et crie son « pourquoi ? »...

          « Mais il vous est avantageux que je m'en aille... »

          Jésus essaya de faire comprendre à ses bien-aimés le pourquoi de cette crise nécessaire. En fait, ses disciples « marchaient par la vue », comme on dit. Ils le suivaient facilement, aussi facilement que le peuple d'Israël qui n'avait qu'à cheminer derrière la nuée se déplaçant devant lui. Désormais, les apôtres auraient, eux aussi, à apprendre à « vivre par la foi » (2 Corinthiens 5.7). Ils auraient à grandir dans ce domaine afin de pouvoir répandre, à leur tour, la semence vitale de la confiance, d'une confiance parfois très dépouillée d'encouragements visibles. Et puis, Jésus était pour eux un Ami magnifique. Après son départ et la venue du Saint-Esprit, le Consolateur, Jésus deviendrait pour eux et pour beaucoup, une réalité spirituelle toujours présente.

          « Mais il vous est avantageux que je m'en aille... »

          Les disciples ne comprirent pas cela tout de suite, tant s'en faut ! Serons-nous mieux avertis et moins désarçonnés quand, dans nos vies, il faudra parfois que le bien s'en aille pour faire place au mieux ?

          Comprendrons-nous et accepterons-nous ce qui nous arrive quand, nous aussi, nous passerons par ces indispensables crises de croissance ? Il faut bien le dire, ces périodes-là ne sont pas faciles ; et plusieurs restent par trop longtemps dans de très néfastes perplexités « quand le bien s'en va pour faire de la place au mieux... »

          Écoutez plutôt le résultat d'une petite enquête à laquelle j'ai eu la fantaisie de me livrer pour vous :

          Je suis allé trouver des oisillons, dix jours après leur sortie de l’œuf (après leur nouvelle naissance, dirions-nous en pensant à ceux qui viennent de se convertir).

          - Alors, comment ça va les petits frères ? leur ai-je demandé…

          - Vous n'avez qu'à voir, m'ont-ils répondu. La vie est belle, le nid est si douillet... Vous pouvez toucher et admirer la finesse du duvet qui nous recouvre, ont-ils ajouté en s'endormant d'aise...

          (S'endormir d'aise, quel danger dans la vie spirituelle! )

          Peu de temps après, je les ai revus. Quel changement, et pas du tout pour le mieux, apparemment ! Ils étaient à la fois dodus et comme neurasthéniques...

          - Qu'est-ce qu'il y a qui ne va pas, les petits frères ? leur ai-je demandé...

          - Ah ! dit l'un d'eux, nous ne savons pas ce qui nous arrive. Notre beau duvet doux et doré s'en est ailé… Nous osons à peine nous montrer, tant nous  sommes humiliés. Et non seulement nous sommes presque aussi dépouillés que des poulets à rôtir, mais il nous pousse des sortes d'étuis piquants qui nous font craindre que le Créateur nous ait abandonnés et que nous devenions de petits hérissons...

          - Mais non, leur ai-je dit, ce qui vous arrive est normal. Les petits étuis contiennent les belles plumes qui vous rendront indépendants et adultes.

          - Mais seront-elles aussi fines et dorées que les premières ? m'ont-ils demandé, larmoyants.

          - Peut-être pas, mais qu'est-ce que cela peut bien vous faire ? Il ne faut pas toujours désirer retourner à ce que vous avez eu quand vous étiez tout petits. Il faut apprendre à grandir (1 Corinthiens l3.11; 14.20).Tenez, ajoutai-je, je vais vous enseigner un petit refrain, et chaque fois que vous verrez s'en aller une légère plume dorée de votre duvet infantile, vous vous chanterez la phrase que je vais vous apprendre; voulez-vous?

          - Dis toujours, répondirent-ils, pas encore très rassurés.

          - Eh bien ! voilà ce qu'il faudra chanter : Mais il nous est avantageux qu'elle s'en aille...

Depuis le temps de cette interview, j'écoute ce que disent les oiseaux le matin, au temps où ils perdent certaines de leurs plumes. Et il y en a de sages qui, au lieu de se lamenter quand l'une d'entre elles s'envole pour faire de la place à une meilleure, chantent à tue-tête, comme pour se mieux convaincre :

 

          Mais il est avantageux qu'elle s'en aille,

          Mais il est avantageux qu'elle s'en aille,

          Mais il est avantageux qu'elle s'en aille...

 

          Et ils disent vrai, n'est-ce pas ?

          Poursuivant mon enquête, j'ai questionné le blé en herbe qui, dès à présent, avec une légitime fierté, va préparer notre pain de demain. Il a fallu que je prête bien l'oreille pour l'entendre, mais je crois avoir saisi et gardé l'essentiel de ce qui me fut confié. En voici un fidèle résumé :

          - Quand j'étais en belle réunion d'épis, dans la chaleur de l'été passé, pour moi, grain de blé à côté de beaucoup d'autres, c'était une vraie fête... Je faisais partie de la moisson du Seigneur... J'étais du blé et non pas de l'ivraie... Cependant, ma joie n'était pas égoïste pour autant, car je me souviens d'avoir prié, disant : « 0 Seigneur, fais que je sois utile ! » Je fus convaincu qu'il m'avait entendu et que j'aurais le bonheur de rapporter à mon Maître dix, vingt, trente ou même soixante grains semblables à moi. Quelle magnifique perspective, n'est-ce pas ? Cette première et bonne joie dura un certain temps. Puis tout se gâta... Je passai de l'euphorie au plus noir désespoir. Et quand je dis noir, je n'exagère pas, car figurez-vous que je dus subir une série d'épreuves incompréhensibles. Je fus battu, dépouillé de ma belle et luisante enveloppe de balle et... finalement, jeté dans le noir de la terre... J'avais bien demandé d'être utile, mais je n'avais pas demandé cela... Ma belle apparence avait disparu ; je me sentais mal et il me semblait que la vie m'abandonnait... Je criai au secours et, pour toute réponse, je crus discerner une voix disant : « Si un grain ne tombe en terre et ne meurt, il ne peut porter du fruit » (Jean 12.24). D'abord, je ne compris pas le pourquoi de tout ce qui m'était arrivé. Maintenant, j'ai saisi ; je revis d'une vie toute pleine d'une plus grande certitude, d'une espérance renouvelée. Il fallait que je passe par cette crise de vie, par cette crise de croissance. En fait, me dit-il, peut-on progresser sans crise ? Peut-on avancer sans dépasser ce que l'on doit laisser ? Ne faut-il pas consentir plus d'une fois à perdre même ce qui est bien en vue du mieux que Dieu prépare ?

          - Oui, c'est vrai, grain de blé ; Dieu a eu un Fils sans péché, mais il n'a jamais eu un fils sans épreuves fécondes...

          Pour grandir, pour être utile, il faudrait être plus d'une fois dépouillé... (Philippiens 3.14).

          « Mais il vous est avantageux que je m'en aille... »

          Si je n'avais pas quelque crainte de vous lasser, amis lecteurs, je vous dirais encore en détail ce qu'un sarment de la vigne du Seigneur m'a confié. En deux mots, en voici le plus important :

          - Quand je fus greffé en Christ, ce qui fut pour moi une authentique « nouvelle naissance » (Jean 3.3), je me mis à grandir très rapidement ; et tout allait bien. J'étais attaché au Cep et je sentais sa sève passer en moi (Jean 15.4). Cependant, je dus m'apercevoir que « Dieu est un Dieu d'ordre » (1 Corinthiens 14.33). Moi, je croissais n'importe comment. Lui avait un plan pour moi. Aussi m'attacha-t-il pour que je prenne la forme qu'Il désirait. Vous savez que c'est assez contraire à la nature que d'être mis en forme et, généralement, les jeunes branches n'aiment pas la symétrie, ni la discipline indispensable à la mise en forme...

          - Je sais, je sais, repris-je en songeant à quelques-unes de mes expériences et à quelques sarments de ma connaissance qui ont bien de la peine à se laisser mettre en place comme Dieu l'indique dans sa Parole…

          - Toutefois, c'est ce qui se passa ensuite qui me blessa le plus, reprit le sarment.

          - Ah ! tu penses à la taille ?

          - Précisément, me répondit-il. Après tout, n'est-ce pas dans la nature du sarment sain que de grandir ? Et quand je vis quelques-unes de mes pousses s'en aller, tranchées par le sécateur que maniait la main du Vigneron, je n'y compris plus rien. Surtout que je n'étais pas un sarment stérile, loin de là. J'avais déjà quelques belles grappes à mon actif... Une bien vieille souche me consola à peine en récitant ce verset de l’Écriture Sainte : « Tout sarment qui porte du fruit, il l'émonde afin qu’il porte encore plus de fruit » (Jean 15.2).

          Amis convertis, il est dans l'ordre de la vie que nous connaissions des crises de croissance. Il nous est avantageux d'être dépouillés même de ce qui est bien, parfois… Dans ces moments-là, prenez garde à la puissance absorbante de l'affliction... Résistez à son hypnotisme satanique ! Par la grâce de Dieu, ne fixez pas vos yeux sur ce qui s'en va, mais sur ce qui se prépare de meilleur par la providence de Celui qui a promis de faire tout concourir au bien de ceux qui l'aiment (Romains 8.28).

          Mon cher ami Georges me le rappelait l'autre jour quand, me parlant des années qui s'en étaient allées, au lieu de se plaindre des ennuis de la vieillesse, il me disait : « Mais cela nous rapproche de la vie! »

          « Mais il est avantageux que je m'en aille ! »

          Une chère enfant de Dieu était infirme et devait marcher avec des béquilles. Elle avait souvent crié à Dieu de la délivrer ; cependant, rien ne s'était produit. Un jour, dans sa villa, elle glissa malencontreusement sur le palier du premier étage et tomba, tandis que ses béquilles dégringolaient jusqu'au bas des marches. Elle était seule et ne pouvait pas se relever. Loin de s'affoler, elle implora le Seigneur et essaya de se relever quand même. Elle y réussit avec peine... Puis, au nom de Jésus, elle fit quelques pas... qui se multiplièrent, car elle ne se servit plus jamais de ses béquilles ! Ne soyons pas trop désemparés si quelque bien-aimée ou utile béquille nous est enlevée. Il vaut mieux s'appuyer sur le Seigneur que sur les choses, ou parfois sur les gens.

          Amis, dans ces moments de dépouillement où le « bien » s'envole et où nous ne comprenons plus – et pour autant que notre cœur ne nous condamne pas – ,vivons par la foi et entendons la voix de ce qui s'en va, la voix disant : « Mais il vous est avantageux que je m'en aille. »

          Le bien doit faire de la place au meilleur. Oui, Dieu fera tout concourir à ce qui nous est avantageux, car il est bon, il sait mieux, il peut tout et il nous aime !

          Un dernier mot. Dans sa tendresse, le Vigneron nous ménagera des périodes de repos où nous ne connaîtrons pas le travail de l'émondage, c'est certain. Nous lisons, en effet, dans le livre du Lévitique (chapitre 25.3-4}: « Pendant six années tu tailleras ta vigne... mais la septième année sera un temps de repos ; tu ne tailleras point ta vigne ! »

          Dans les périodes de repos où tout va bien, ami ou amie en Christ, réjouis-toi. Mais dans les périodes de taille, où le « bien » s’envole, confie-toi à ton Maître et attends-toi avec espérance « au meilleur » qui prendra, en son temps, la place du bien qui s’en est allé !

          Amen ! et alléluia pour toutes choses !

 

Adolphe HUNZIKER

www.batissezvotrevie.fr

 

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