L’AMI IMPORTUN

 

 

L’AMI IMPORTUN

(Luc 11.5-13)

 

L’attitude dans la prière

 

Le meilleur moyen d'apprendre à faire quelque chose consiste généralement à observer quelqu'un le faite correctement. Un jour. un disciple de Jésus l'observa en train de prier, et la puissance spirituelle de la communion du Seigneur avec son Père dut puissamment l'impressionner. Il devait probablement voir le manque d'intensité et de profondeur de sa propre vie de prière. Il demanda donc à Jésus : «Seigneur, enseigne-nous à prier, comme Jean l'a enseigné à ses disciples» (11.1).

Cette question et la réponse de Jésus nous enseignent que la prière ne vient pas naturellement. Il ne s'agit donc point de la simple maîtrise d'une technique, comme la mémorisation d'un théorème mathématique ou l'élaboration du plan d'un exposé. Il faut l'apprendre de Christ, par la grâce au moyen de la foi, et cet enseignement divin vient dans le cœur au travers des influences du Saint-Esprit et de la Parole. Une fois acquise et fidèlement mise en pratique, cette instruction devient le moyen d'une expérience croissante de l'amour de Jésus-Christ. En ce sens donc, nous avons besoin d'apprendre et d'exercer la grâce de la prière de la foi, un monde dans lequel le chrétien s'efforce de grandir.

Il n'est pas difficile d'être un chrétien virtuellement dénué de prière. Il faut au contraire travailler avec foi à la prière, la cultiver et la nourrir, de sorte qu'elle nous devienne plus précieuse que l'air frais, et plus vitale que le plaisir le plus riche de l'expérience quotidienne. En vérité, la croissance chrétienne commence (ou finit) dans notre vie privée de prière. L'attitude de prière est une marque vitale du royaume des cieux dans le cœur.

 

 

La parabole de l’ami importun (11.5-8)

 

Jésus répond à la question du disciple en donnant une prière modèle, la version de Luc du « Notre Père », plus courte que celle rapportée par Matthieu. Les différences entre les deux servent simplement à souligner le fait qu'une simple répétition correcte de mots n'intéresse pas Jésus. Il veut une prière ordonnée mais libre (11.2-4).

La parabole qui suit immédiatement cette prière aborde le sujet des réponses à la prière, puis Jésus en applique les leçons (vv.9-13). Il établit avec clarté la certitude que les prières de tout chrétien recevront leur exaucement, et que celui qui prie dans la foi verra la preuve de cette réponse au temps voulu par Dieu.

 

Le visiteur nocturne inattendu (11.5-7)

 

Imaginez que, tard un certain soir, il vous arrive un visiteur inattendu qui vous prend totalement au dépourvu. Vous voulez lui préparer un repas pour le restaurer après son voyage, mais vous n'avez rien du tout à la maison. et il est près de minuit. Un ami habite au coin de la rue, et vous êtes sûr qu'il vous aidera dans un cas comme celui-ci. Vous allez donc frapper à sa porte et lui demander : «Ami, prête-moi trois pains, car un de mes amis est arrivé de voyage chez moi, et je n'ai rien à lui offrir.»

Mais votre ami a fermé la porte, tout le monde est endormi, et lui-même commence à sommeiller. Aussi, avec l'irritabilité hébétée de quelqu'un à moitié réveillé, il lance de l'intérieur: «Ne m'importune pas, la porte est déjà fermée, mes enfants et moi nous sommes au lit, je ne puis me lever pour te donner des pains.»

Nul besoin de lui prêter de mauvaises motivations, vous savez combien il est difficile de se réconcilier avec un appel téléphonique nocturne. Vous avez du mal même à vous souvenir de votre propre nom, sûrement encore moins la capacité de traiter votre correspondant de façon rationnelle !

Jésus commence son histoire avec : «Si l'un de vous— » (11.5, en grec : tis ex humon). Il est donc légitime de voir toute la parabole comme une longue question de rhétorique. Que feriez-vous dans cette situation ? Abandonneriez-vous ou persisteriez-vous jusqu'à ce que vous obteniez ce que vous voulez ?

 

La persistance paie (11.8)

 

Jésus n'attend pas la réponse : « Je vous le dis, même s'il ne se levait pas pour les lui donner parce que c'est son ami, il se lèverait à cause de son importunité et lui donnerait tout ce dont il a besoin. » Même si l'amitié n'y arrive pas, la pure hardiesse et persistance l'obtiendront !

N'en est-il pas ainsi dans la vie ? L'enfant qui veut un bonbon ne cesse de harceler sa mère jusqu'à ce qu'il l'obtienne (ou reçoive autre chose !). La persistance est un ingrédient normal et nécessaire pour atteindre un but. C'est la preuve de l'engagement et l'essence de l'effort. Personne ne reçoit de louanges parce qu'il a abandonné après une seule tentative. Si vous n'y arrivez pas d'emblée, essayez, essayez et essayez encore ! Jésus ne se contentait pas de donner une leçon sur la «persistance», comme s'il s'agissait d'une abstraction ou d'une vertu en soi. Il visait un but spirituel concret, en rapport avec la vie dans son royaume. avec la nature de la vie de disciple poussée vers Dieu par la foi.

Si même nos amis humains nous aident à cause de notre persistance et de notre importunité, à combien plus forte raison Dieu pourvoira-t-il à nos besoins si notre prière à rechercher son aide revêt ces deux qualités ! Oui, nous aurons peut-être à harceler un ami ou un conjoint en raison de leur manque de sensibilité. Mais le Seigneur sait ce dont nous avons besoin avant même que nous le lui demandions (Matthieu 6.8). Sa sensibilité à l'égard de son peuple surpasse infiniment la profondeur de tout sentiment parmi les hommes.

«Ainsi, dit Jésus, lorsque vous priez comme je vous l'ai enseigné, persistez dans cette prière, avec une foi inébranlable et continuelle dans le fait que votre Père céleste entend et répandra selon sa parfaite volonté pour vous. Même si sa réponse tarde, comme celle de l'ami dans la parabole, sachez qu'elle viendra si vous persistez à crier vers lui.»

Un autre aspect se rapporte à la nature de la prière elle-même. La parabole présente trois éléments applicables à cette relation entre Dieu et son peuple qui s'exprime dans la prière.

Un besoin authentique. Cet homme ne vient pas avec une requête frivole, désinvolte et superflue. Elle n'a pas non plus une importance bouleversante, mais il s'agit simplement du besoin de l'heure et, malgré un moment et des circonstances inhabituels, d'une sorte de besoin normal. Le Dieu qui prend garde à la chute d'un oiseau s'intéresse aussi à l'ordinaire de notre vie.

Un amour altruiste. Cet homme n'aurait pas dérangé son ami ainsi pour son propre besoin. Son action provient de son amour pour le voyageur épuisé.

L'absence d'autres sources d'aide. L'homme n'a nulle autre part où aller, et seul ce voisin peut l'aider. Certains prient alors qu'ils devraient agir. «Je vais prier à ce sujet» sert trop souvent d'excuse pieuse pour ne pas faire ce qui devrait l'être. Nul besoin par exemple de prier pour savoir s'il faut aller à l'église ; allez-y tout simplement ! La prière est la liaison par laquelle la puissance salvatrice de Dieu se répand. en Jésus-Christ, dans l'expérience de tout enfant de Dieu.

 

«J'aime l'Éternel, car il entend ma voix, mes supplications ; 

car il a penché son oreille vers moi ;

et je l'invoquerai toute ma vie.

Les liens de la mort m'avaient environné,

et les angoisses du séjour des morts m'avaient saisi ; 

J'étais en proie à la détresse et à la douleur.

Mais j'invoquerai le nom de l'Éternel :

Ô Éternel, sauve mon âme !» (Psaume 116.1-4)

 

Au centre même de cette marque de la vie du royaume qu'est la prière, se trouve la conscience de notre perdition hors du Seigneur. Tout vrai chrétien ne peut que s'écrier :

 

«Tous les travaux de mes mains pour te plaire seraient vains,

lors même qu'en ma détresse mes pleurs couleraient sans cesse, 

ils ne sauraient me laver : Toi seul peux et veux sauver !» (« A toi la gloire », n°241)

 

« Et moi, je vous dis…» (11.9-13)

 

Jésus applique immédiatement sa parabole dans la pratique. Sa déclaration revêt toute la force de l'autorité divine. L'Esprit de Dieu confronte l'esprit des hommes. Cette déclaration se rapporte au besoin impératif de persister dans la prière (11.9-10) et à la promesse que Dieu bénira richement la prière persistante (11.11-13).

 

«Demandez... cherchez…frappez» (11.9-10)

 

Nulle exhortation ici à offrir une prière de temps à autre, et encore moins d'encouragement à réciter quelque mantra «chrétien». Dieu ne se laisse pas impressionner par un simple flot de paroles (Matthieu 6.7). Il faut absolument une prière persistante de piété.

 

1. La prière doit persister vers son but. Jésus donne un triple encouragement à prier : «Demandez... cherchez... frappez.» En toile de fond, se tend une supposition tacite assez troublante. Bien que quelques fois Dieu donne tout de suite ce qu'on lui demande, il ne le fait pas dans la plupart des cas. Jésus doit donc souligner le besoin de persistance. Pourquoi cela ? Tout simplement parce qu'une seule requête ne coûte pas grand-chose.

N'importe qui acceptera de faire au moins un essai. J'ai lu un jour sur une affiche : «Essayez la prière.» Ce n'est pas ce à quoi Jésus pense. N'importe qui peut «essayer» la prière. Mais, de quelle sorte de prière s'agit-il ? A qui, pour quoi ? Jésus avait donné un modèle pour l'ordre de nos prières à son Père. Il exhorte maintenant à la persévérance dans la pratique d'une telle prière théo-centrique.

Afin de persister sans cesse, jusqu'à l'obtention, à son heure, de la bénédiction du Seigneur, il faut une foi chrétienne humble et authentique. L'orgueil et l'incrédulité abandonnent lorsqu'ils ne reçoivent pas de réponse. «Dieu n'existe pas, ça n'a pas marché !», disent-ils. La persévérance, quant à elle, exige de l'amour, de la foi, de la confiance et une sainte persuasion. Cela est vrai dans nos rapports avec les gens. «Oh, je lui ai déjà demandé», disons-nous de celui dont nous avons cherché la faveur. Nous avons besoin de quelque consécration pour continuer à essayer.

 

2. La prière doit grandir en intensité de consécration. Les trois verbes (tous dans un temps qui indique la répétition) impliquent que nos prières ne doivent pas se limiter aux requêtes les plus dénudées. La recherche doit suivre la demande, avant de frapper. Nous n'avons pas ici trois synonymes mais un engagement croissant dans le processus de la prière de la foi.

Nous devons chercher, c'est-à-dire nous exercer davantage dans le but de prier correctement et d'être entendus de Dieu. Ceci inclut la réflexion sur la raison de notre demande. S'accorde-t-elle clairement avec la volonté de Dieu telle que la révèle la Bible ? Existe-t-il quelque obstacle en moi, pensant au témoignage du psalmiste : «Si j'avais conçu l'iniquité dans mon cœur, le Seigneur ne m'aurait pas exaucé» (Psaume 66.18).

Y a-t-il un problème à régler ? Me faut-il chercher la réconciliation avec un frère, avant de revenir et chercher la bénédiction de Dieu sur les choses pour lesquelles j'ai prié ? (Matthieu 5.24) Les silences de Dieu sont toujours empreints d'invitations à nous sonder nous-mêmes afin de voir si nous vivons réellement la vie de la foi comme nous le devrions (2 Corinthiens 13.5).

Puis, il nous faut frapper, continuer avec l'intensité d'un Jacob dans sa lutte à Péniel : «Je ne te laisserai point aller, que tu ne m'aies béni» (Genèse 32.26). Le vendeur qui quadrille son territoire et frappe aux portes témoigne de son engagement envers son emploi. De même la persistance apporte la preuve d'un véritable esprit de prière.

Pensez à la femme cananéenne, qui demanda à Jésus de guérir sa fille possédée, et s'entendit répondre : «Je n'ai été envoyé qu’aux brebis perdues de la maison d'Israël... Il n'est pas bien de prendre le pain des enfants, et de le jeter aux petits chiens.» S'en alla-t-elle en colère ou déprimée ? Non ! Elle l'implora davantage : «Oui, Seigneur... mais les petits chiens mangent les miettes qui tombent de la table de leurs maîtres... -Femme, lui dit Jésus, ta foi est grande qu'il te soit fait comme tu veux» (Matthieu 15.21-28).

Pensez à Bartimée, le mendiant aveugle. Plus on cherchait à le faire taire, plus il criait fort : «Fils de David, aie pitié de moi !» Jésus lui dit : «Va, ta foi t'a sauvé» (Marc 10.46-52). Pensez aussi à l'apôtre Paul, qui pria à trois reprises afin que son «écharde dans la chair » lui soit ôtée. La bénédiction vint après une prière persistante, non en la disparition de l'écharde, mais en une croissance de la grâce pour la supporter ! «Ma grâce te suffit, car ma puissance s'accomplit dans la faiblesse» (2 Corinthiens 12.7-9).

 

«À combien plus forte raison le Père céleste…» (11.11-13)

 

Finalement, Jésus donne un encouragement sur la certitude des promesses divines en rapport à sa réponse à nos prières fidèles. Il en appelle au caractère paternel et céleste de Dieu, et le fait de manière à accentuer la force de son message. Dans la parabole elle-même, il parlait d'une situation entre amis (11.5-7). Ici, il aborde une relation paternelle et filiale. Il appuie son message en nous amenant à regarder l'attitude de Dieu en rapport à ses enfants. L'argument passe du moindre au supérieur. Si nos pères terrestres savent comment donner de bonnes choses à leurs enfants, «à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent» (11.13).

«Quel est... le père qui donnera une pierre à son fils, s'il lui demande du pain ?» (11.11) Le lien avec la parabole est évident. Si l'ami donne trois pains à minuit, quelle sorte de père donnerait une pierre à son fils affamé ? Donneriez-vous «un serpent» à votre fils «au lieu d'un poisson», ou «un scorpion» à la place d'«un œuf» ? Personne ne se moquerait d'une manière si ingrate de ses enfants. Il existe, il est vrai, des pères qui trompent leurs enfants de toutes sortes de façons bizarres, mais ce sont à juste titre des criminels de la pire espèce.

L'argument est imparable. «Si donc, méchants comme vous l'êtes» (et nous savons très bien au fond de notre cœur que nous sommes pécheurs, bien que sauvés par grâce) «vous savez donner de bonnes choses à vos enfants, à combien plus forte raison le Père céleste donnera-t-il le Saint-Esprit à ceux qui le lui demandent» (11.13).

Le Dieu saint ne peut pas s’empêcher d'aimer ses enfants ! Remarquez en outre que, à la fois dans le « Notre Père » («Donne-nous chaque jour notre pain quotidien») et dans la parabole de l'ami importun, Jésus nous amène au don du Saint-Esprit ! Oui, nous pouvons et devons prier pour notre pain quotidien ! Mais nous demandons beaucoup plus au Seigneur. Il donne son Saint-Esprit. Il se donne lui-même ! La certitude de sa réponse est absolue.

De même, l'assurance dont les croyants peuvent bénéficier est complète et sans faille. Jésus ne le dit pas ici mais, dans le Saint-Esprit, nous venons à celui qui est le commencement de la prière de foi, ainsi que le plus haut don que Christ puisse accorder en réponse à la prière. Il est «l'Esprit d'adoption, par lequel nous crions : Abba ! Père !», celui-là même, qui rend «témoignage avec notre esprit que nous sommes enfants de Dieu» (Romains 8.15-16). Il est la raison pour laquelle la prière est «l'air naturel» du chrétien.

 

Gordon KEDDIE

www.batissezvotrevie.fr

 

 

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