La résurrection spirituelle

 

 

LA RESURECTION SPIRITUELLE

(1° partie)

 

Discours prononcé par Charles Spurgeon un jour de Pâques

 

« Lorsque nous étions morts en nos fautes, Dieu nous a vivifiés ensemble avec Christ. » (Eph. 2.5). 

 

Vous vous attendez, sans doute, mes chers auditeurs, à ce que j'appelle votre attention, en ce jour, sur le glorieux événement dont l'Eglise chrétienne célèbre la mémoire. Telle n'est pourtant pas mon intention. Mais si le sujet que j'ai à cœur de méditer avec vous n'est point la résurrection de Christ, du moins peut-on dire qu'il s'y rapporte dans une certaine mesure. Ce sujet le voici : La résurrection spirituelle de l’homme pécheur et perdu.

 

 

C'était aux chrétiens d'Ephèse, vous le savez que l'Apôtre adressait les paroles de mon texte; mais elles s'appliquent avec non moins de vérité à tous ceux qui, à une époque ou à une autre et dans quelque lieu que ce soit de la terre habitable, ont été élus en Jésus-Christ, rachetés par son sang, justifiés par sa grâce. D'eux aussi, il est vrai de dire que morts dans leurs fautes et dans leurs péchés, ils ont été vivifiés par l'Esprit de Dieu. 

 

Mes frères, quel spectacle solennel que celui d'un cadavre ! Quand, hier soir, j'essayai de me placer, par l'imagination, en face des réalités de la mort, mon âme, je l'avoue, recula d'épouvante. Je fus comme anéanti ! « Quoi ? me disais-je, est-il donc vrai que ce corps où je sens palpiter la vie sera bientôt un festin pour les vers! qu'en dehors et en dedans de ces orbites où maintenant mes yeux étincellent, ramperont d'immondes créatures, progéniture de la corruption ! que ces membres, aujourd'hui pleins de vigueur, étendus dans la froide immobilité, dans l'abjecte impuissance de la mort, deviendront un objet d'invincible dégoût, pour ceux-là même qui me chérissent le plus, en sorte qu'ils s'écrieront avec Abraham : « Otez mon mort de devant moi !... » Peut-être, mes frères, ne parvenez-vous pas encore à réaliser, dans toute son horreur, ce lugubre tableau. Dites : ne semble-t-il pas étrange, ne semble-t-il pas incroyable, que vous qui, ce matin, êtes venus dans ce lieu de culte, serez un jour portés dans le sépulcre ; que ces regards qui en ce moment même sont fixés sur moi, seront voilés d'une obscurité éternelle que ces langues qui, tout à l'heure, faisaient entendre une sainte harmonie, bientôt ne seront plus qu'un peu de boue ; que vous enfin, mon cher auditeur, que je vois en cet instant devant moi, dans toute la force de l'âge et de la santé, serez incapable de mouvoir un muscle, d'articuler un son, et deviendrez une masse inerte, fille de la fosse et sœur de la corruption ?... Sans doute, nul n'ignore ces sombres vérités ; nul ne peut les révoquer en doute ; mais n'est-il pas vrai que lorsque, par la pensée, l'on essaie de se les appliquer à soi-même, on est presque tenté de les déclarer impossibles ? Ah ! c'est que la mort exerce sur notre enveloppe terrestre de si épouvantables ravages ; elle met en pièces, d'une façon si hideuse, cette admirable organisation, chef-d'œuvre du Créateur, que c'est à peine si notre intelligence étonnée peut la suivre dans son œuvre de vandalisme ! 

 

Toutefois, mes chers amis, efforcez-vous de vous faire une idée aussi exacte que possible de ce qu'est un cadavre, et lorsque vous y serez parvenus, dites-vous, je vous prie, chacun en particulier, que c'est là l'image employée dans mon texte pour représenter la condition de votre âme par nature. Et en vérité, l'Apôtre n'eût pu faire usage d'une métaphore plus juste ; car de même qu'un cadavre est passif, inerte, insensible, prêt à se décomposer, ainsi est toute âme humaine si elle n'a été vivifiée par la grâce de Dieu. Nous sommes morts dans nos fautes et dans nos péchés ; la mort habite en nous, et ce germe de mort est susceptible de se développer graduellement, de telle sorte que, laissés à nous-mêmes, nous tous qui sommes ici, pourrions devenir avec le temps des objets véritablement hideux, - hideux par nos vices et notre corruption morale, tout comme le cadavre est rendu hideux par la corruption matérielle. Voilà, mes frères, ce que nous enseigne l'Ecriture, touchant l'état moral de l'homme. Dans toutes ses pages, elle nous dit que depuis la chute, l'enfant d'Adam par nature est mort ; qu'être perdu et dégradé, il est dans un sens spirituel absolument privé de vie. Elle nous enseigne, en outre, que s'il obtient la vie, ce ne peut être que grâce à une véritable résurrection opérée dans son âme par l'Esprit de Dieu, et que cette résurrection, il la devra, non à aucun mérite qui pût être en lui, mais uniquement au bon plaisir du Père, à un effet tout gratuit de sa miséricorde infinie et souveraine. 

 

Voilà, je le répète, la doctrine qui ressort de la Bible tout entière ; et c'est sur cette doctrine, formulée avec une remarquable précision dans les paroles de mon texte, que je désire, mes chers auditeurs, appeler votre attention pendant quelques instants. Je ferai mon possible pour rendre mes développements intéressants en même temps que clairs. Dans l'espoir d'atteindre ce double but, j'illustrerai, en quelque sorte, mon sujet d'une manière qui, au premier abord, vous paraîtra, sans doute un peu étrange. Vous vous souvenez que pendant son séjour sur la terre, le Seigneur Jésus accomplit trois résurrections : je ne sache pas qu'il en ait accompli d'autres. En premier lieu, il ressuscita une enfant de douze ans, la fille de Jaïrus, qui, étendue sans vie sur sa couche, se leva incontinent, dès que Jésus eut prononcé cette seule parole : « Talitha cumi ! ». En second lieu, le Seigneur ressuscita le fils de la veuve de Naïn, qui, couché sur sa bière, était transporté au tombeau, et qu'il réveilla de son sommeil de mort par ces mots : « Jeune homme., je te le dis, lève-toi ! ». Enfin, la troisième et la plus mémorable résurrection opérée par Jésus, fut celle de Lazare, lequel n'était plus ni sur son lit, ni en chemin vers la tombe, mais dont la corruption avait déjà fait sa proie, lorsque le Seigneur, par le verbe de sa toute-puissance; le rappela à la vie, en criant à haute voix : 

 

« Lazare, sors dehors ! » 

 

Ces trois faits, mes chers amis, je les transporterai, pour ainsi dire, dans le domaine spirituel, et je les emploierai comme des types ou des images pour représenter successivement d'abord, les différences extérieures qui existent entre les âmes inconverties, quoique leur condition soit au fond la même ; en second lieu, les différents moyens de grâce employés pour vivifier les pécheurs, quoique la vie ne procède que d’un seul et même agent ; enfin, les différentes manifestations de cette vie, qui pourtant est une dans un sens absolu.  

 

J'ai dit qu'il existe certaines différences extérieures entre les âmes inconverties, mais que leur condition n’en est pas moins la même ; j'ajoute que cette condition, commune à tous, c'est la mort. Approchez-vous, mes frères, par la pensée, de la fille de Jaïrus. Voyez-la étendue sur son lit : ne dirait-on pas que la vie est encore en elle ? Les lèvres de sa mère effleurent encore son front, la main de son père presse encore sa main, et c'est à peine si ce père, si cette mère peuvent se persuader que leur enfant est morte ; mais il n'est que trop vrai : elle est morte, aussi morte qu’elle ne peut jamais d'être.  

Voyez maintenant ce jeune homme qu'on porte en terre. Il est plus que mort, passez-moi l'expression ; il commence à se corrompre ; déjà les teintes livides, précurseurs de la dissolution, sont répandues sur son visage. Et cependant, quoique la mort soit plus apparente chez lui que chez l'enfant, à proprement parler, il n'est pas plus mort qu'elle, car il n'y a point en réalité de degrés dans la mort.

Mais voici un troisième cas où la mort se révèle avec plus d'évidence encore ; c'est celui de Lazare, - de Lazare, dont Marthe, faisant usage de mots non couverts, pouvait dire : « Seigneur, il sent déjà mauvais, car il est là depuis quatre jours ». Toutefois, remarquez-le mes frères, la fille de Jaïrus n'était pas moins morte que Lazare. Il y avait différence quant à la manifestation extérieure de la mort, mais non point quant à la mort elle-même. 

 

Ainsi en est-il des âmes qui n'ont point été vivifiées par la grâce de Dieu. J'ai, sans nul doute, en cet instant devant moi quelques-unes de ces créatures favorisées que l'œil se plaît à contempler. Elles sont belles à voir de toutes manières, belles par leurs qualités morales, aussi bien que par leurs charmes extérieurs. Il semble en vérité qu'elles réunissent tout ce qui est bon et désirable ; et pourtant, si elles sont irrégénérées (notez bien ceci), elles sont mortes, complètement mortes ! A voir la fille de Jaïrus, qui eût dit qu'elle n'était plus qu'un cadavre ? Une main tendre et pieuse n'avait pas encore fermé ses yeux ; dans son regard brillait encore comme un dernier reflet de lumière. Pareille à un lis à peine détaché de sa tige, elle n'avait rien perdu de sa grâce. Le ver n'avait pas commencé à creuser sa joue ; les couleurs de la vie ne s'étaient pas flétries sur son front ; elle paraissait encore appartenir au monde des vivants. Et vous de même, chères jeunes âmes dont je viens de parler, vous possédez tout ce que le cœur peut désirer, sauf la seule chose nécessaire ; il ne vous manque absolument rien, si ce n'est le souffle divin, l'amour du Sauveur ; vous n'êtes pas unies à Jésus par une foi vivante ; c'est pourquoi, - je vous le dis avec douleur, mais je dois vous le dire, - vous êtes mortes ! vous êtes mortes ! aussi mortes que les derniers des pécheurs, quoique votre mort ne soit pas aussi apparente. - Mais à côté de ces filles de Jaïrus, il est certainement aussi, dans cet auditoire, des êtres qui ont fait un pas de plus, dirai-je, dans la mort spirituelle. Il y a encore en eux, je le reconnais, quelques restes de bons sentiments, mais ils ont commencé à céder à leurs inclinations mauvaises. Ils ne sont pas encore des intempérants sans pudeur, des blasphémateurs sans frein ; leur inconduite n'est pas encore assez scandaleuse pour que leurs semblables n'en puissent tolérer la vie. Comme chez le jeune homme de Naïn, la corruption qui couve au-dedans d'eux n'a pas encore ouvertement éclaté au dehors. Mais, qu'ils ne s'abusent point : quoiqu'ils ne soient pas descendus au dernier degré de la dépravation, quoique le monde ne les rejette pas de son sein, ils sont morts ! ils sont morts ! tout aussi morts que les derniers des pécheurs! Et n'y a-t-il point aussi parmi ceux qui m'écoutent, de ces derniers, de ces plus avilis des hommes, véritables Lazare spirituels, chez qui la mort revêt son plus hideux aspect ? Semblables à des cadavres dans leur sépulcre, leur âme est en pleine putréfaction. Leurs mœurs sont abominables ; leur conduite tout entière inspire l'horreur la plus profonde ; ils sont mis à l'index de toute société qui se respecte : la pierre est en quelque. sorte roulée sur leur tombeau. Ils ont si complètement perdu tout sens moral que ceux qui les connaissent ne veulent plus soutenir aucune relation avec eux, et semblent s'écrier à leur manière : « Otez ce mort de devant nous, car nous n'en saurions supportera vue ! » Et cependant, mes frères, - j'insiste sur ce point, - ces âmes si corrompues, si perverties, ne sont pas en réalité plus mortes que les autres âmes irrégénérées, de même que Lazare n'était pas plus mort que la jeune fille à qui il ne manquait que le souffle. Les fruits de la mort sont plus visibles, il est vrai, chez les unes que chez les autres ; mais toutes également sont privées de vie ; toutes ont un égal besoin d'être vivifiées par Jésus-Christ. 

 

Mais permettez-moi, mes amis, d'entrer dans quelques détails, et de vous indiquer les traits principaux qui constituent la différence existant entre les trois classes d'âmes dont je viens de parler. Pour cela, continuons notre rapprochement, et revenons d'abord à la fille de Jaïrus. Voici donc cette jeune fille : regardez-la de nouveau. Loin de vous repousser, sa vue, n'est-il pas vrai ? vous attire. Elle est morte, et pourtant, elle est encore belle. Quoique privée de vie, elle est pleine de charmes et de grâces. Quel contraste avec le jeune homme ! toute beauté a disparu! de sur ses traits ; on devine que le ver est déjà à l'œuvre ; toute sa gloire s'est évanouie. Quel contraste surtout avec Lazare ! Il n'est plus qu'un foyer de corruption !... Mais chez la fille de Jaïrus il existe, je le répète, une beauté extérieure. Il en est de même de beaucoup de ceux qui m'écoutent en ce moment. N'est-elle pas, en effet, pleine de grâce, cette jeune âme dont le souffle impur du péché semble avoir respecté la candeur ? Qui pourrait ne pas l'aimer ? N'est-elle pas aimable, n'est-elle pas belle entre toutes ? N'est-elle pas digne d'être admirée, souvent même d'être imitée ? Ah ! sans doute, elle est tout cela ; elle est plus encore peut-être, je suis le premier à en convenir ; mais, hélas ! hélas ! Dieu le Saint-Esprit n'a pas encore soufflé sur elle, elle n'a pas reconnu Jésus pour son Sauveur, ni imploré son pardon ; elle possède tout, excepté la vraie religion ; et dès lors, elle est morte, - morte malgré toute sa beauté, malgré tous ses attraits ! Oh ! ma sœur, ma chère sœur, pourquoi faut-il qu'il en soit ainsi ? pourquoi faut-il que toi si douce, si aimable, si tendre, si compatissante, je sois obligé de te compter au nombre de ceux qui sont morts dans leurs fautes et dans leurs péchés ? Comme mon Maître pleura jadis sur le jeune riche, qui avait gardé tous les commandements, mais à qui il manquait une chose, ainsi je pleure aujourd'hui sur toi ! Oui, je pleure à la pensée que toi, ornée de qualités si précieuses, de tant de dons du cœur et de l'esprit, tu n'en es pas moins plongée dans la mort ! car, ne te fais point illusion, tu es morte aussi longtemps que tu n'as pas la foi en Christ. Ta bonté, ta vertu, ton excellence ne te serviront de rien : tu es morte, et tu ne saurais vivre si Jésus ne te donne, la vie. 

 

Remarquez, en outre, que la fille de Jaïrus est encore entourée d'amis. Elle vient d'exhaler le dernier soupir et sa mère la couvre de tendres baisers. Oh ! se peut-il bien qu'elle soit morte ? Les caresses qu'on lui prodigue ne parviendront-elles pas à la ranimer ? Et les larmes brûlantes qui pleuvent sur elle ne suffiront-elles pas à féconder cette terre froide, il est vrai, mais assez riche encore, semble-t-il, pour que la vie jaillisse de son sein ? Hélas ! non : ces caresses, ces larmes sont stériles ; la semence de la vie manque ; l'enfant ne respire plus ; néanmoins, c'est à qui se pressera autour d'elle, c'est à qui la comblera de témoignages d'amour. Quel contraste avec le jeune homme ! Il est étendu sur sa bière ; personne ne le touchera plus, et si quelqu'un le touchait, il serait souillé. Quel contraste surtout avec Lazare ! une pierre est scellée sur lui. N'en est-il pas de même de vous, chères âmes auxquelles je me suis déjà adressé ? n'êtes-vous pas entourées de l'amour de tous ? Le peuple de Dieu lui-même vous chérit d'une affection cordiale ; il vous recherche, il vous estime, il vous approuve. Votre pasteur prie souvent pour vous. Admises dans les assemblées des enfants de Sion, vous vous asseyez avec eux comme si vous étiez des leurs, vous entendez ce qu'ils entendent, vous chantez ce qu'ils chantent. Et pourtant, pourtant hélas! vous le dirai-je? vous êtes encore dans la mort. Il ne vous manque absolument qu'une chose, mais c'est la seule qui puisse vous sauver ; il ne vous manque qu'une chose, mais cette chose c'est là vie. En vain les enfants de Dieu vous ouvrent-ils leur sein, en vain vous accueillent-ils dans leur compagnie ; ils ne sauraient allumer en vous cette étincelle sacrée de la vie ; et si jamais vous l'obtenez, sachez-le, vous devrez vous joindre au plus grand des pécheurs pour répéter avec l'Apôtre : « Lorsque nous étions morts dans nos fautes et dans nos, péchés, Dieu nous a vivifiés avec Christ ». 

 

Mais considérons encore la jeune fille. Voyez, elle n'est point revêtue des insignes de la mort. Ni le suaire ni le linceul ne l'enveloppent. On ne l'a point dépouillée de ses habillements ordinaires. Elle est vêtue exactement comme elle l'était le jour où, ressentant les premières atteintes de sa maladie, elle s'étendit sur sa couche. On ne l'a point livrée définitivement à la mort. Il n'en est pas de même du fils de la veuve : l'appareil de la sépulture l'environne ; ni de Lazare : il est lié pieds et mains. Mais je le répète, la fille de Jaïrus est encore revêtue du costume des vivants. Ainsi en est-il de l'âme simple et ingénue dont je parle. Jusqu'à présent, elle semble n'avoir aucune habitude coupable, aucun mauvais penchant déclaré ; et tandis que tel jeune homme est déjà emprisonné dans le linceul de son inconduite, et que tel pécheur vieilli dans le vice est lié pieds et mains par ses passions désordonnées, cette âme se pare de tous les ornements extérieurs de la piété. Elle agit comme les chrétiens, elle parle comme eux ; sa conduite semble pure, digne d'éloges, irrépréhensible : c'est à peine si l'on pourrait y discerner quelques taches... Hélas, hélas ! chère âme, pourquoi faut-il qu'une si belle parure, des apparences si aimables ne recouvrent que la mort ? Vainement as-tu orné ton front du brillant joyau de la bienfaisance ; vainement as-tu ceint tes reins des chastes robes de la pureté extérieure, hélas ! ma sœur, il faut bien que je te le dise, si tu n'es pas née de nouveau, tu es encore dans la mort ! Ton excellence s'évanouira comme la teigne ; tes prétendues bonnes œuvres s'en iront en fumée, et, au jour du jugement, tu seras pour jamais séparée des justes, à moins que Dieu ne te donne la vie. Oh ! je gémis, je gémis amèrement sur cette foule de jeunes âmes qui semblent avoir été préservées jusqu'ici de toute souillure du monde, mais qui n'en sont pas moins sans vie et sans salut ! Oh ! plût à Dieu, jeune homme, plût à Dieu, jeune fille, que des vos premières années, vous fussiez vivifiés par l'Esprit ! 

 

Veuillez, mes frères, observer un détail encore. Dans le cas de la jeune fille, la mort était, pour ainsi dire, une chose secrète. C'était dans sa chambre que l'enfant avait rendu le dernier soupir ; c'était dans sa chambre que son corps inanimé reposait, et rien probablement ne laissait soupçonner au dehors le douloureux mystère que recélait cette maison de deuil. Il n'en était pas ainsi du jeune homme, car on l'avait transporté jusqu'aux portes de la ville, et beaucoup de gens l'avaient vu ; ni de Lazare, car des Juifs étaient venus de Jérusalem pour -pleurer sur sa tombe. Mais la mort de la fille de Jaïrus n'avait point ce caractère de publicité, et il en est de même des âmes dont je l'ai prise pour type. Jusqu'à présent, leur péché se cache dans l'ombre ; il est tout intérieur. La convoitise a bien conçu dans leur cœur, mais, le péché n'est pas encore enfanté ; le germe des passions existe en elles, mais ce germe impur ne s'est point manifesté par des actes. Le jeune homme n'a point encore porté à ses lèvres la coupe enivrante, quoique souvent une voix séductrice lui en ait vanté les douceurs ; la jeune fille n'a point abandonné les sentiers de la vertu, quoique souvent elle ait prêté l'oreille aux suggestions de la vanité : en un mot, leurs mauvais penchants n'ont point franchi les limites du for intérieur ; personne peut-être n'en soupçonne l'existence. Hélas, mon frère ! hélas, ma sœur ! qu'elle est triste la pensée que vous, dont la vie extérieure est si louable, vous cachez pourtant de secrètes souillures dans la chambre de votre cœur, et que dans les replis les plus intimes de votre être, vous portez la mort spirituelle, - mort aussi véritable, quoique moins évidente, que celle du pécheur le plus scandaleux. Oh ! Dieu veuille que vous puissiez vous écrier aujourd'hui même : « Malgré toutes nos justices, malgré toutes nos vertus, nous étions morts, comme les autres, dans nos fautes et dans nos péchés, mais Dieu nous a vivifiés. » Mes amis, mes chers amis, souffrez que j'insiste encore sur ce point. Il y a des âmes dans cet auditoire, au sujet desquelles j'éprouve les plus vives appréhensions. Je l'ai déjà dit, elles possèdent tout ce que le cœur peut souhaiter, mais il leur manque une chose : elles n'aiment pas mon Maître. O vous, jeunes gens, qui fréquentez assidûment les parvis du Seigneur, et dont les murs sont irréprochables, pourquoi faut-il que votre piété soit comme une plante sans racine ? O vous, vierges de Sion, qu'on voit toujours dans la maison de prières, pourquoi faut-il que vous n'ayez point la grâce de Dieu dans le cœur ? Prenez garde, je vous en supplie, vous, âmes simples, naïves, aimables, innocentes aux yeux des hommes ! Lorsque viendra le grand jour où le Seigneur séparera les vivants d'avec les morts encore une fois, je vous le déclare avec douleur, si vous n'avez été converties, régénérées, vivifiées par l'Esprit de Dieu, malgré toute votre excellence, vous serez rangées parmi les morts ! 

 

(à suivre)

Charles SPURGEON

 

Écrire commentaire

Commentaires: 0