DOSSIER « LA MORT ET L’AU-DELA »
L’ÂME EST-ELLE IMMORTELLE ?
En se basant sur certains textes bibliques, on s’est demandé si, après tout, l’âme humaine ne serait pas mortelle. D’après Paul, Dieu « seul possède l’immortalité » (1 Tim.6.16), qui ne serait donc pas l’apanage de l’homme. D’autre part, l’Ecriture dit : « L'âme qui pèche, c’est celle qui mourra », Ezéch. 18. 4. (1) « Le salaire du péché, c’est la mort », Rom. 6.23. Comme le corps est décomposé, de même, pensent certains, l'âme est anéantie par la mort. Elle ne serait donc pas immortelle et la doctrine de l'immortalité de l’âme, loin d’être biblique, serait due à des influences païennes et surtout grecques. Pour les conditionnalistes, notre immortalité serait entièrement soumise à la condition de la foi: l’homme, mortel par nature, ne serait qu'un candidat à l’immortalité, et son «immortalisation » serait le but même de la rédemption. La vie des méchants, prolongée au-delà de la tombe, ne serait que transitoire et devrait finalement s’éteindre. Donnons ici quelques mots d'explication au sujet des théories grecques, celles de Platon en particulier.
Les Grecs (avec beaucoup de peuples païens) croyaient à la survivance de l’âme, mais pas dans le même sens que l'Ecriture. Platon considère la matière comme un mal. L'âme existe avant le corps, étant par nature divine et immortelle. Dans le corps sensuel, elle est prisonnière, comme un être étranger. Le « salut » se résume dans la délivrance de la corporalité. Si l’âme a été entièrement purifiée, elle vivra toute l'éternité sans corps. De telles théories sont évidemment la négation de la notion biblique de la résurrection du corps, liée à la régénération de l’âme. D'autre part, la Bible ne méprise pas la matière, et ne dit pas que le corps soit mauvais en soi, puisqu'il a été créé parfait par Dieu, et peut être sanctifié par le Saint-Esprit qui l’habite; l'âme enfin n’est ni préexistante à la naissance, ni divine en elle-même. Que les idées platoniciennes aient influencé certains théologiens et Pères de l'Eglise, l’Histoire le prouve. Mais elles ne se sont pas infiltrées dans le Nouveau Testament, et on ne peut, en les rejetant, refuser le témoignage tout différent de la Révélation.
Revenons à la question posée : La Bible enseigne-t-elle l'immortalité de l’âme ? Nous avons vu que Dieu « seul possède l’immortalité », car il est la source de la vie ; il est « la vie » même et seul, par essence, il est éternel, Jean 1.4; 14.6; Ps. 90.2. Mais Paul ne dit pas que seul Dieu est immortel. Il possède l’immortalité, et en dispose comme d’un don accordé souverainement à ses créatures. Les textes bibliques nous semblent en effet clairement affirmer ceci :
1. Il y a une survie dans l’autre monde, pour les justes et pour les injustes. En ce qui concerne les justes, citons simplement la parole du Christ d’après laquelle les patriarches sont tous vivants, bien que disparus depuis des siècles ou des milliers d'années, Luc 20. 37-38. Quant aux injustes, ils survivent dans le séjour des morts, selon Es. 14.9-10 et Ezéch. 32.21-31. Jésus nous enseigne que, pleinement conscients, ils souffrent dès leur départ d’ici-bas, Luc 16.19-31. Tous les impies sortiront du séjour des morts pour subir le jugement dernier et la peine de l'enfer, Apoc. 20.12-15.
2. Cette survie, pour les uns comme pour les autres, n'aura pas de fin. Il va sans dire que la vie éternelle des élus durera toujours. Nous verrons plus loin que le tourment des réprouvés aura la même durée, puisque les uns vont à la vie éternelle et les autres au châtiment éternel, Mat. 25.46; dans l'étang de feu et de soufre, les impies sont tourmentés. jour et nuit, aux siècles des siècles, Apoc. 14.10-11; 20. 10.
3. Le terme d’« immortalité » est appliqué par l’Ecriture seulement au corps ressuscité, et non pas à l’âme (voyez 1 Cor. 15.53 b). C’est le corps corruptible qui se décompose et disparaît; c'est lui qui a besoin de devenir incorruptible et immortel. Quant à l’âme, si elle connaît la « mort spirituelle », elle ne cesse nullement d'exister, ni dans ce monde ni dans l’autre. C’est ce que nous aurons amplement l’occasion de démontrer.
À titre de suggestion, on peut établir le tableau suivant : l'homme reçoit
à sa naissance, dans son âme, l’existence sans fin,
à la nouvelle naissance, dans son esprit, la vie éternelle,
à la résurrection, dans son corps, l’immortalité.
4. Remarquons qu’il n’est jamais parlé non plus de l’immortalité des anges. Ils sont des esprits créés et destinés sans aucun doute à une existence sans fin. Le fait que la Bible ne les appelle pas « anges immortels » ne signifie pas qu'ils ne vivront pas pour toujours dans l’autre monde.
5. Bien qu’appelés à une existence éternelle, les pécheurs impénitents sont en même temps privés de la vie véritable, qui est la communion vivante avec Dieu. « La vie éternelle, c’est qu'ils te connaissent, toi le seul vrai Dieu, et celui que tu as envoyé, Jésus-Christ », Jean 17.3. « C’est lui (Jésus-Christ) qui est le Dieu véritable et la vie éternelle », 1 Jean 5.20. Déjà sur la terre l'impie est dans la mort spirituelle : Il est séparé de Dieu, mort dans ses fautes et dans ses péchés, selon Eph. 2.1, à la fois « mort, quoique vivant » d’après 1 Tim. 5.6. En somme dans le langage biblique,
la vie est l’existence avec Dieu,
la mort est l'existence sans Dieu.
La vie tire sa valeur et son bonheur de Dieu qui en est la source. La « mort » consiste dans la privation de l’amour, de la joie et de la paix qui procèdent de Dieu seul. Nous pouvons dire avec l’Ecriture que dès ici-bas le croyant a la vie éternelle; il goûte déjà le ciel sur la terre, il a Dieu dans son cœur, avant d'aller le rejoindre pour toujours là-haut. Par contre, l’impie est déjà maintenant dans la mort (voyez encore 1 Jean 3.14-15). Il connaît quelque chose de l'enfer sur la terre, d’où le Seigneur est de plus en plus chassé: bientôt, dans l’au-delà, cet impie réalisera toute la souffrance qu’implique la séparation éternelle d'avec Dieu.
6. Puisque la Bible ne le fait pas, nous n’emploierons pas le terme d’« immortalité de l’âme ». Mais, avec force, nous affirmerons comme elle l'existence sans fin à laquelle est appelé l'homme créé à l’image de Dieu. Vinet a écrit : « Je ne crois pas à l’immortalité de l'âme, mais à l’immortalité de l’homme, qui est corps et âme » (Lettres, Tome IV, p.77, Payot 1949). Cela est vrai à propos des justes comme des injustes, puisqu'il y aura une résurrection corporelle pour les uns comme pour les autres, Jean 5.28-29.
R.P.
(1) Ce passage d’Ezéchiel 18.4 appelle une explication particulière. Il est constamment cité par ceux qui croient à l’anéantissement de l’âme. On lui fait dire en somme que non seulement le corps du pécheur mourra, mais encore son âme. Or le texte met l’accent sur une pensée différente. Le mot « âme » est souvent pris dans le sens de « personne ». C’est précisément le cas ici. Ezéchiel parle dans tout ce chapitre de la responsabilité respective des parents et des enfants insistant sur le fait que chacun, le père ou le fils, devra payer pour son propre péché. « L’âme du fils comme l’âme du père, l’une et l’autre sont à moi ; l’âme qui pèche (c’est-à-dire la personne qui pèche, celle qui est responsable) c’est celle qui mourra », v.4. Ce texte ne précise donc rien sur le sort du pécheur dans l’autre monde.
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